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mercredi 2 février 2011

La Spéculation, c’est une garantie et un plus (selon Madelin)!

Ce mardi matin sur BFM radio avait lieu comme d’habitude l’émission Les Experts. Évidemment, comme d’habitude il fallait supporter un défilé d’”experts » tous plus ultralibéral les uns que les autres. Mais comme d’habitude, également, il nous a fallu supporter Alain Madelin qui dans une longue tirade sur la spéculation nous a expliqué, pauvres ignorants que nous sommes tous, que la spéculation c’est très bien (sauf dans de rares cas). Il faut bien avouer que c’est du grand art ! D'ailleurs, les autres participants l’ont écouté sans mot dire, tellement ils étaient sidérés.

À un auditeur qui par email demande pourquoi le prix du blé augmente tant, Madelin fait la réponse incroyable que voici :

« Hormis quelques phénomènes moutonniers sur les marchés alimentés effectivement par un argent facile à un moment donné, mouvement moutonnier qui sont très souvent pris à rebours par la réalité économique, je considère qu’il est dangereux de spéculer sur les matières premières quand on n’est pas un spéculateur avisé.

Hormis cela, ce qui détermine le cours des matières premières, ce sont les fondamentaux, la loi de l’offre et de la demande, très variable selon les matières premières. Il est d’ailleurs extrêmement intéressant de voir que des matières premières qui donnent lieu à un marché mondial spéculatif avec des marchés à terme, le mot fait peur “spéculation”, mais en réalité, si on l’a développé au cours du 19e siècle c’est que l’on considérait que c’était une garantie, c’était un plus, ce n’est pas un mal, fondamentalement c’est un plus sur ces marchés.

Vous avez des marchés très spéculatifs comme le blé, vous avez des marchés qui ne sont absolument pas spéculatifs parce qu’il y a trop de variété, parce qu’on ne peut pas les standardiser, etc. comme le riz ou l’acier, et vous vous apercevez que vous avez la même volatilité sur les marchés (a ce moment-là, tout de même un “expert” tente un “non”) qui sont spéculatifs et sur les marchés qui ne le sont pas. Alors fondamentalement ce sont des causes réelles, et puis, à ces causes réelles vous retrouvez le phénomène qui est connu, archiconnu depuis le discourt célèbre en France sur le commerce des grains, sur la guerre des farines en Angleterre, etc. c’est qu’à un moment donné quant on commence à avoir peur, on remplis les greniers et cela ne sort plus ce qu’à fait par exemple la Russie en créant un embargo sur son blé au moment ou il y a eu les incendies, c’est ca qui est criminel. Et ce qui est assez drôle c’est que le type qui a la plus grande responsabilité sur la crise du blé l’an dernier, Monsieur Medvedev, a été chargé par Monsieur Sarkozy de la réflexion sur les matières premières. » Madelin croit-il vraiment a ce qu’il dit sur la volatilité des marchés spéculatifs ? Nous verrons plus loin qu’il a raison à +/- 15% près en moyenne (entre 5% et 25% en fait) : ces 15% sont la volatilité produite par la spéculation !

Après la vérité de Lapalisse que constitue le « je considère qu’il est dangereux de spéculer sur les matières premières quand on n’est pas un spéculateur avisé », puis de « ce qui détermine le cours des matières premières, ce sont les fondamentaux, la loi de l’offre et de la demande », nous avons droit au clou du spectacle « le mot fait peur “spéculation”, mais en réalité, si on l’a développé au cours du 19e siècle c’est qu’on considérait que c’était une garantie, c’était un plus, c’est pas un mal, fondamentalement c’est un plus sur ces marchés ». C’est très fort ! La spéculation est donc un « bien » inventé au 19e siècle (comme si cela avait été créé exprès et prévu depuis le début !) qui offre une garantie (sur quoi d’ailleurs ?), un plus (lequel ?). On voit bien dans cette affaire que le seul plus de la spéculation est pour le spéculateur et pour les marchés, mais en aucun cas pour les consommateurs finaux. Alors, Madelin indique tout de même des limites à cette « bonne » spéculation : il ne faut pas, tout de même, affamer le peuple. Qu’on augmente artificiellement les prix du blé est une bonne chose, mais attention aux révoltes du peuple qui a faim : Monsieur Medvedev ce n’est pas bien ce que vous avez fait, vous avez spéculé au risque d’affamer votre peuple ! Vilain !

Monsieur monsieur Madelin, franchement pour qui nous prenez-vous ? Deux auditeurs qui vous ont entendu ont réagit en directe en dénonçant l’”aveuglement d’Alain Madelin » : « La crise des sub-prime, c’est les paroles chinoises, et la hausse des prix des matières premières c’est le méchant Russe, mais Wall Street est toujours innocent ! ». Alors, Madelin, prix aux pièges de son idéologie à grosses ficelles, dégaine l’arme ultime des ultras libéraux : si vous n’êtes pas d’accord avec moi c’est que vous n’êtes pas compétant et vous n’avez rien compris, écoutez-le, mais accrochez-vous la phrase est longue est tarabiscotée : « Non, c’est toujours difficile parce que beaucoup de gens ne connaissent pas la finance et la finance elle devient de plus en plus sophistiquée et les circuits de cette finance sophistiquée sont mystérieux et quand c’est mystérieux ont a tendance a avoir des explications simplistes et les explications simplistes naturellement l’emportent sur les explications plus complexes qu’il faudrait donner et que je m’efforce de donner ». Mais du coup, cela le force tout de même a s’expliquer : « S’il n’y avait pas de spéculation il n’y aurait pas la possibilité de se garantir à terme pour un agriculteur contre les aléas climatiques pour vendre son blé à un prix convenu à l’avance, ou pour Airbus de se protéger contre les fluctuations du dollar, donc globalement c’est un jeu positif ».

Cela serait donc cela la garantie, le plus qu’apporte la spéculation dont nous parlait Madelin : pouvoir se prémunir contre des risques naturels ou conjoncturels grâce à cette sorte de gens que sont les spéculateurs… À vrai dire si la spéculation n’existant pas il pourrait y avoir tout de même des assurances, toute ne sont pas assimilable à un casino ! Dans tous les cas, Madelin devrait nous expliquer ce qu’apporte la spéculation sur le blé, car là nous ne voyons pas bien. Il nous explique ensuite que globalement la spéculation est un jeu à somme nulle car « le gain d’un spéculateur est la perte de l’autre de sorte que lorsque l’on dit que les spéculateurs gagnent beaucoup d’argent ceci n’est pas exact, ceci peut être vrai à un moment donné, mais ceci sur une longue période n’est pas exact puisque ceci reste un jeu à somme nulle » (NDLA: CQFD, le serpent se mort la queue ici). Cette belle tirade est bien entendue complètement fausse, car pour espérer gagner un peu d’argent en spéculant, il faut avoir une somme d’agent libre et conséquente (être riche ou aisé) et comme il le disait lui-même plus haut être un spéculateur avisé, ce qui n’est pas, hélas, la majorité des boursicoteurs et encore moins des spéculateurs. C’est d’ailleurs pour cela qu’il y a encore des spéculateurs, car si le jeu était réellement à somme nulle, plus personne ne spéculerait puisque l’on ne gagne rien ! Au contraire, la spéculation persiste puisque les « avisés » se goinfrent sur le dos des benêts. Le jeu est à somme nulle au total, mais pas pour tout le monde ! Remarquez que, lorsque cela l’arrange le jeu est positif (pour les assurances d’Airbus par exemple), et lorsque cela ne l’arrange pas le jeu est nul. Étrange…

Cette astuce lui permet de conclure en beauté « s’en prendre aux spéculateurs qui s’en mettraient plein les poches ça n’a pas de sens en revanche les spéculateurs jouent un rôle extrêmement utile, plus ils sont nombreux mieux c’est sous certaines réserves qu’ils soient avisés, ont en disait un mot tout à l'heure […], mais les spéculateurs nombreux jouent un rôle important puisqu’ils donnent de la liquidité au marché et plus le marché est liquide et profond, plus cela permet de se protéger contre les aléas de l’avenir, c’est pour cela que la spéculation a été inventée ». Cette tirade est d’autant plus impressionnante que dans la même phrase il nous indique que les spéculateurs sont utiles et que leur utilité vient des liquidités qu’ils apportent. Or c’est précisément de ces liquidités dont il parlait au début de son intervention déplorant les « phénomènes moutonniers sur les marchés alimentés effectivement par un argent facile ». Encore une fois, la boucle est bouclée. Quand à son expression de marché “profond” c’est de la pure poésie !

Jean-Marc Daniel, également invité, est tout a fait d’accord avec cette position c’est dire s’il y avait comme d’habitude un débat. Pourtant le lendemain, à la même heure sur la même radio les invités disaient tout le contraire… Ils estimaient que la spéculation sur les matière premières n’étaient pas du tout souhaitable mais représentait entre 5 et 25% des variations de prix. La fameuse liquidité dont parlait Madelin.

Bref, résumons, Madelin nous fait croire que la spéculation est une création humaine volontaire, car bénéfique alors qu’elle n’est qu’un parasitisme qui permet a certains de profiter de la naïveté des non « avertis ». Il nous fait croire que plus les investisseurs sont nombreux plus le marché se porte bien ! Il ne faut donc surtout pas taxer ou punir les spéculateur. Ces derniers d’ailleurs ne gagnent rien (sur une longue période) et tout ce qu’ils font c’est uniquement pour le bien de tous (sic!). Une question se pose : pourquoi diffuser de telles inepties ? Par ignorance ? Volontairement ? Si l’on est tenté de penser à la première solution, c’est la deuxième qui semble bien être la réalité. En effet, si l’on en juge par le mal qu’il se donne a essayer de démontrer l’indémontrable, utilisant des phrases dignes d’Oudini, c’est bien parce qu’il a conscience de l’inexactitude de ses propos, mais qu’il essaye de les justifier tout de même. Le fait qu’il nous rappelle à deux reprises que pour spéculer il faut être « avertis » c’est parce qu’il ne veut pas qu’on lui reproche un jour d’avoir incité des spéculateurs amateurs qui se seront fait “avoir”. Alors, pourquoi mentir ? Pour qui roule-t-il ? Quel est son véritable intérêt dans cette histoire ?

Bien entendu, il représente les intérêts de ses amis de la finance, justement ceux qui profitent à fond d’une abondance d’investisseurs naïfs et peu habitués à “cette finance sophistiquée” et “mystérieuse” qu’ils pourront « plumer » à loisir. Autant dire que cela va être juteux !

Note: Dans la même série de “sorties” incroyables de Madelin lisez “Le discourt des ultralibéraux décrypté” sur ce blog.

11 commentaires:

jack52 a dit…

J'aimerai que Madelin nous explique les raison pour lesquelles une industrie laitière rencontre des éleveurs ayant le label AOC, ce qui veut dire que le lait est réservé pour une variété de fromage AOC, pour leur demander de baisser leur prix du litre de lait? Cette baisse aurait-elle une répercussion sur le prix de vente du produit transformer? une augmentation de salaires pour leurs salariés? vous pouvez rire tiens.
Est-ce que le lait serait spéculatif?
Pendant deux jours j'ai eu l'occasion de discuter avec les éleveurs d'une région de la France et qui avaient voté nabot en 2007. Il est clair que pour 2012, ils ne vont pas y retourner.
Continue comme cela Madelin, tu es dans la bonne voie.....

Jean-Pierre Rougie a dit…

Le spéculateur n'est qu'un parasite de l'économie, et quand des millions d'hommes sont victimes d'eux, chômage famine et autres calamités liées à cette économie spéculative, on devrait les juger pour crime contre l'humanité.

Jacques Colares a dit…

La spéculation sur les produits alimentaires est un crime contre l'humanité.
Cela doit être aboli, le plus rapidement possible.

Frantz Andre a dit…

La hausse des prix sur les denrées alimentaires n'est pas seulement lié à une insuffisance de l'offre mais à un rationnement de celle-ci par certains opérateurs de marché. C'est le meilleur moyen pour spéculer à la hausse.

La nécessité d'avoir de la liquidité sur un marché, qui limite le risque de contrepartie entre acheteurs et vendeurs n'est pas seulement le fait de la spéculation.
Mais l'interdépendance qu'elle a, avec les nouvelles technologies qui permettent de traiter les flux instantanément. Et la confiance des agents économiques entre eux.
Pas de confiance = pas d'échanges.

La spéculation c'est quand même peu de gagnants mais beaucoup de perdants. Il faut avoir un pouvoir sur le marché pour maximiser ses gains; que seule les banques, les fonds et les banques centrales possèdent. Les marchés financiers sont ultra monopolistique! Et cela Sir Madelin se cache bien de le claironner sur tous les toits...

Dominique Lelièvre a dit…

"S’il n’y avait pas de spéculation il n’y aurait pas la possibilité de se garantir à terme pour un agriculteur contre les aléas climatiques pour vendre son blé à un prix convenu à l’avance,"

Quel nul. Les marchés à terme ont eu certes pour objet, dans leurs débuts, de permettre aux opérateurs économiques (dont les producteurs) de se garantir contre les fluctuations DE PRIX. Rien à voir avec le climat. (mais Madelin est sans doute resté marqué par l' imperméable mastic qui servait d'uniforme à ses sbires d'Occident). On peut donc dire que sans les marchés à terme ces opérateurs seraient plus exposés à ces variations de prix. Mais la spéculation n'est pas inhérente aux marchés à terme; elle en est une utilisation abusive. Une des solutions proposées avait été d'interdire ou du moins de taxer les opérations à terme et autres options ne se dénouant pas par des échanges physiques, les "operations nues", inutile de dire qu'on n'en parle plus grâce aux copains de Madelin...

cow boyboy a dit…

Ce qui me choque le plus dans les propos de M.Madelinc'est qu'il accuse de criminel M.Medvedef d'avoir protégé son approvisionnement intérieur en décrétant l'arret des exportations .Ce n'est pas étonnant de la part d'un ultra-libéral toute intervention protectionniste sur le marché est un crime .Il est préférable d'affamer son peuple !!!!!pour aller plus loin dans son raisonnement c'est la Russie qui est responsable des révolutions de TUNISIE ET D'EGYPTE une famine et une révolution en Russie aurait été preferable .

D'autre part il faut relativiser ce qu'on appel b[flambé des cours du blé] a 240-250€/T en 1984 je vendais déja du blé à 204 €/T ,,aprés des cours en 2009 qui frisaient à 90-100 €/T 2010 n'est qu'une bouffée d'air qui leur permet d'echapper à la noyade mais qui paradoxalement va noyer tout le secteur d'elevage ,c'est la raison pour laquelle la "grogne" des paysans parait bien souvent "incohérente" pour le consommateur déconnecté de la réalité paysanne C'est la pression de l'OMC qui incite tout les pays producteur dans le Monde d'abandonner une politique de STOCKS et de libéraliser le MARCHE qui a engendré cette situation sans prendre en compte l'augmentation de la consommation mondial .C'est du pain béni pour les spéculateurs comme dans la finance sans régulation la porte est ouverte pour pratiqué leur DEAL sans complexe à la hausse comme à la baisse .Ils ont des logiciels qui leur permet d'être informer de toute les informations mondial alimentaires(surface,état des cultures,climat,indice de consommation etc......)pour déclencher leur deal ,c'est du délit d'initié sécurisé à leur niveau mais sans véritable garanti pour le paysans :juste de prendre un bon bouillon qui en laissera encore qq uns sur le carreau quand la bulle s'effondrera .Aucun paysans petit comme gros n'a une capacité d'action sur ce marché mondial :il subbit en faisant de son mieu pour ne pas être la prochaine victime

Jean Peuplus a dit…

Pour ceux que ça intéresse assez pour lire cet article de la Tribune de Genève de novembre 2010. Je précise pour ceux qui l'ignorerais que la Tribune de Genève n'est pas vraiment un journal gauchiste.
(article dans le message suivant)

jean Peuplus a dit…

péculation sur les denrées alimentaires, spéculation sur la vie

La spéculation sur les céréales ou le maïs entraîne des flambées du prix des denrées alimentaires et condamne des millions de personnes à la faim. Les problèmes causés par les catastrophes naturelles, la production des agrocarburants et la demande en aliments pour bétail promettent aux spéculateurs de juteux rendements. La spéculation sur les denrées alimentaires devient une spéculation sur l'existence.

Plus d'un milliard de personnes continuent de souffrir de la crise alimentaire. Ceux qui espéraient que l'explosion des prix de l'été 2008 serait maîtrisée et que les prix se stabiliseraient à nouveau autour du prix moyen qui prévalait avant 2007 se sont trompés: le rapporteur spécial de l'ONU sur le droit à l'alimentation affirme que l'on n'a rien appris de la crise alimentaire de 2008. Depuis la mi-2009, le prix des denrées alimentaires est de nouveau en hausse et une inversion de la tendance n'est pas en vue. Jacques Diouf, le chef de la FAO, le dit: «De nouvelles révoltes de la faim pourraient bien avoir lieu». Actuellement, les céréales, les oléagineux et le sucre augmentent beaucoup. Selon le premier ministre indien, «il faut être réalistes: la crise alimentaire ne va pas se résoudre de sitôt».

On connaît les raisons de la crise: baisses de production due à des catastrophes écologiques (comme les inondations qui ont frappé le Pakistan, les incendies et la sécheresse en Russie dont les récoltes de blé ont été fortement compromises), demande sans cesse croissante des pays émergents, boom de l'agrocarburant et de l'industrie de l'alimentation pour les animaux. Les négociants en matières premières et les investisseurs tirent profit de cette demande. Ils dopent les prix et encaissent d'énormes gains en exécutant des opérations à terme sur les marchandises. Plus de la moitié des céréales produites aujourd'hui n'arrivent pas dans les assiettes: elles sont brûlées comme agrocarburants ou servent d'alimentation pour les animaux. Ce ne sont pas les 500 millions de petits paysans constituant la moitié des affamés de la terre qui profitent de cette augmentation des prix, mais bien l'industrie agroalimentaire qui cultive à très grande échelle. La plupart du temps, ces cultures et le commerce des produits agroalimentaires sont dans les mains des mêmes entreprises.

Une discrète plaque tournante du commerce des produits alimentaires

Le commerce des matières premières est essentiellement géré en Suisse. Cette position dominante s'explique par les avantages liés au lieu, l'intérêt de la place financière, les avantages fiscaux, une bonne infrastructure, des liaisons étroites avec l'étranger, etc. Plus de 12'000 négociants de matières premières se sont ainsi établis en Suisse.

La branche redoute la publicité et la transparence. Qui donc sait que l'entreprise Glencore, dont le siège est à Baar/ZG, a généré en 2008 un chiffre d'affaires de 152 milliards de dollars, ce qui représente plus que les chiffres d'affaires de Nestlé et de Novartis ensemble ? Les informations que Glencore donne sur elle-même se limitent au strict minimum. L'entreprise, qui fait commerce de métal, de minéraux et d'énergie, s'est lancée en 1982 dans le commerce agroalimentaire. Elle négocie sucre et blé, maïs, riz et oléagineux - le commerce agroalimentaire en plein boom séduit les investisseurs. Les autorités du canton de Zoug offrent des conditions fiscales extrêmement attrayantes: avec Genève, Zoug est aujourd'hui le centre du négoce de l'industrie minière et du pétrole, auxquels s'ajoutent les produits agroalimentaires.

Jean Peuplus a dit…

(suite)
Avec ses quelque 500 entreprises, la région de Genève est aussi une plate-forme essentielle du commerce mondial puisque plus d'un tiers du commerce mondial du blé, des oléagineux, du riz et du pétrole brut s'y échange. Selon certaines estimations, 80 millions de tonnes de céréales, d'oléagineux et de riz sont déplacées chaque année partout sur le globe à partir de Genève. La région est le numéro 1 mondial du commerce des céréales et du sucre, et elle gère 22% du commerce mondial du coton. Selon certaines estimations, les gains annuels du commerce des matières premières s'élèvent à plus de 2 milliards de francs. On ne sait pas quel pourcentage de ces gains est dû au commerce agroalimentaire, car la branche reste extrêmement discrète. La Suisse ne serait pas la Suisse sans cette grande inconnue, le commerce international de matières premières qui génère un chiffre d'affaires s'élevant à des centaines de milliards de francs.

Transactions boursières spéculatives

Les maisons de commerce ont besoin d'énormes financements pour couvrir leurs coûts d'achat, de sécurité d'approvisionnement, de logistique de transports et de protection des prix - plus de 90% des affaires sont financées à l'étranger par de grandes banques qui garantissent également le déroulement sans heurts des transactions. Parallèlement, elles offrent à leurs clients des fonds d'investissement dans les produits agroalimentaires qui promettent des profits juteux et «un profil bénéfice-risque attrayant» (Deutsche Bank) ou encore des performances qui «restent positives, même quand les marchés des actions faiblissent ou s'effondrent» (UBS). En septembre 2010, le Crédit Suisse s'est allié avec Glencore, géant du commerce de matières premières: ce partenariat permettra à la banque de proposer à ses clients une «plate-forme des matières premières» offrant une large palette de produits - non seulement le pétrole, le charbon et les métaux, mais également des produits agroalimentaires tels que les céréales, le soja, le lait et le sucre.

Le marché des matières premières continue de montrer des taux de croissance de 15% et plus. La spéculation se fait surtout sur les contrats à terme sur les marchandises (Futures); on vend ou on achète une quantité donnée de marchandise à une échéance donnée et à un prix fixé. Ces contrats à terme Futures, qui ont d'abord été pensés pour s'assurer contre les risques liés aux prix sur les marchés, se négocient désormais essentiellement de manière spéculative: seuls 2% de ces contrats aboutissent effectivement à une livraison de la marchandise. Ainsi, le marché attire des investisseurs qui n'ont pas d'intérêt réel pour la marchandise - hedge funds et fonds de pension investissent dans les Futures, avec l'unique objectif d'obtenir les rendements les plus intéressants possible. Les prix qui augmentent promettent des profits en hausse; s'il le faut, on activera un peu le processus en créant artificiellement la pénurie.

Jean Peuplus a dit…

(suite 2)
Au premier semestre 2010, les investissements spéculatifs sur les céréales, le cacao et le sucre ont augmenté de presque un cinquième. Au total, le volume des transactions s'élève à quelque 200 milliards de dollars. L'indice Reuters des matières premières est en augmentation. Pour contrer cette tendance, l'Inde, par exemple, a interdit dès 2007 tous les contrats à terme sur le blé, le riz et les céréales; dans un deuxième temps, elle a étendu cette interdiction au soja, aux pommes de terre et au caoutchouc. La FAO estime que des placements de fonds sur les matières premières constituent près de 35% du marché du blé. Au début de l'été 2010, le prix du blé a doublé en l'espace de deux mois. Là-dessus, la banque américaine Morgan Stanley a recommandé à ses clients de miser sur une nouvelle augmentation du prix du blé, la Russie ayant édicté une interdiction d'exporter à la suite de dramatiques pertes de récolte. D'autres pays, comme le Canada (pluies torrentielles) et l'Australie (sécheresse) ont suivi cet exemple.

Il faudrait aussi poser la question de savoir comment les pays pauvres peuvent s'affranchir des contraintes que ce commerce leur impose, par exemple en se tournant vers une agriculture durable pratiquée sur de petites surfaces et destinée à la population locale, en constituant des réserves à partir de la production indigène et le cas échéant, comme l'Inde l'a fait, en interdisant les contrats à terme sur les denrées alimentaires ou, à l'instar de la Russie, en décrétant une interdiction d'exporter.

Anonyme a dit…

Madelin n'a vraiment rien compris.
Les marchés à termes ont (peut être) été créés pour que les vendeur et les acheteurs puissent se protéger des variations de prix. Mais ensuite sont apparus les spéculateurs qui:
- amplifient les variations de prix
- augmentent la liquidité quand ça les arrangent, mais aussi la diminuent en créant artificiellement des pénuries ( genre je ne vends pas mon riz tant que les cours n'auront pas atteint x$ - tant pis si le peuple ne pas se retenir de manger aussi longtemps - ou pus tôt tant mieux les prix vont monter plus vite)
- augmentent mathématiquement le prix: en effet au final le jeu est peut être à somme nulle mais pas pour es spéculateurs. En effet : prix acheteur = prix vendeur + benef speculateur . Madelin veut nous faire croire que globalement les spéculateurs ne gagnent pas d'argent , dans ce cas d'ou viennent leurs milliards de bénéfices, de bonus, de dividendes. De plus j'ai du mal à croire qu'ils font ça bénévolement juste pour le plaisir ou l'utilité publique.
En fait le spéculateur se comporte comme un intermédiaire qui prends une commission mais qui n'a aucune valeur ajoutée ( il ne se fait pas livrer, il ne gère pas de stock physique, il n'apport pas de modification au produit, n'est responsable de rien et en plus il revend au même endroit ou il a acheté)

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