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mercredi 24 février 2010

La qualité des produits, l’autre grande victime de la crise

52 - Qualité

Une des conséquences les moins attendue de la crise financière est la baisse de qualité des produits que nous achetons aujourd’hui et dans les 3 prochaines années. Pour faire face à une réduction importante des ventes, les entreprises ont due trouver des solutions. La plupart de ces solutions ont un impact sur la qualité des produits qu’elles fabriquent ou vont fabriquer :

  • Pression sur les fournisseurs : le problème est reporte sur le fournisseur qui doit lui-même restaurer sa marge par une ou plusieurs des techniques décrites ci-dessous
  • Chasse au gaspillage : c’est sûrement la plus inoffensive des techniques de restauration de la marge mais peut tout de même parfois avoir un impact sur la qualité. Le but étant d’identifier les étapes inutiles ou génératrices de travaux sans valeur ajoutée, l’impact sur la qualité devrait être nul. En pratique, appliquée à l’extrême, cette méthode peut conduire à des solutions abusives. Exemple : en fin de chaîne de fabrication, au lieu de tester le produit, on effectue un rapide contrôle visuel. L’impact qualité peut être grand dans ce cas mais il faut être conscient que la méthode est tout de même détournée car le test fin de chaîne n’est pas du gaspillage mais une étape essentielle pour garantir la qualité du produit finis
  • Externalisation d’activités : consiste à sous-traiter une activité jugée comme non productive et a faible valeur ajoutée. Etape suivante de la chasse au gaspillage, on optimise les parties non rentables. L’externalisation, présentée ainsi, semble nécessaire et même souhaitable pour de nombreux dirigeants d’entreprise. Néanmoins cette technique est en générale réservée aux moyennes et grandes entreprises. L’impact qualité semble être nul mais a condition que la nature et le cahier des charge des travaux sous-traités soit identique a ce qui était fait en interne. La grande idée derrière les pratiques d’externalisation est que l’entreprise qui reprend un travail fait en interne est un spécialiste du travail et le fera forcément mieux. Cela peut être vrai pour, par exemple, des travaux de ménage, pour des travaux plus complexes ou techniques, ce n’est pas si évident que cela. Citons l’exemple d’une entreprise du CAC40 qui a externalisé sa paye (faite de façon satisfaisante avant) et qui a dû essuyer de nombreux problèmes parfois graves durant un an et demi suivant sa mise en place. Certains problèmes n’étant toujours pas réglés d’ailleurs. L’expertise d’un spécialiste ne semble pas évidente à coup sûrs, tout dépend de la méthode et du sérieux du choix du prestataire. Mais le problème principal vient du fait que les activités sous-traitées n’ont pas le même périmètre, impliquant une chute plus ou moins importante de qualité de la prestation. Cela semble évident d’ailleurs, l’expertise de la société externe est souvent compensée par la marge qu’elle est obligée de faire pour que son activité soit rentable. De nombreuses externalisations sont donc de fausses bonnes idées. Lorsque cette externalisation n’a pas un lien direct avec la conception et/ou la production des produits de l’entreprise, il n’y aura pas, en général, d’impact sur la qualité. En revanche, lorsque l’externalisation touche les activités de conception (R&D) et/ou production, le risque d’une dégradation est grand
  • Autre grande idée des dirigeants d’entreprise pour réduire les coûts : la réduction du personnel par des plans sociaux ou des non remplacements de départs. C’est le tout venant de la gestion d’entreprise. La marge diminue ? Diminuons les « people[1] ». La diminution des forces vives de l’entreprise est souvent catastrophique pour cette dernière. Pour quelles raisons ? Simplement car cela démoralise ceux qui restent, tente les plus performant s (ceux qui ont le plus de chance de trouver du travail ailleurs très rapidement) à partir de l’entreprise, est souvent brutale et ne laisse pas le temps de la réorganisation du travail. Ne soyons pas démagogue : il n’est pas possible de faire le même travail avec beaucoup moins de gens. Consciemment ou inconsciemment, la réduction du personnel s’accompagne très souvent d’une réduction des tâches effectuées voir du bâclage de ces tâches. C’est la que la chute de qualité intervient. La conception, fabrication et contrôle des produits est moins bon, l’impact est inévitable.

Pour résumer, si la crise a eue de nombreux impacts que nous connaissons tous, ce n’est pas le propos de cet article, un impact moins (ou pas du tout) médiatisé est que parmi les entreprises qui ont du réajuster leurs activité face à une baisse de commande ou une baisse de marge, il est plus que probable que la qualité de leurs produits baisse à l’avenir. Pourquoi « à l’avenir » ? Parce que de la conception à la commercialisation, il s’écoule souvent entre 1 et 4 ans suivant les produits. Ainsi les produits « d’après crise » les plus simples à concevoir (sans électronique et/ou partie mécanique complexes) et produire vont bientôt arriver dans le commerce. Pour les produits les plus complexes (produits électroniques, mécaniques ou électrique complexes), il faudra attendre 2010 jusqu’à 2013 avant qu’ils ne soient proposés à la vente. Et à ce moment là vous penserez peut-être à cet article lorsque vous constaterez peut-être des chutes de qualité. Le problème est que cette tendance risque d’être durable, il est plus facile de dégrader la qualité que de la (re)construire encore plus dans un environnement économique et idéologique ou la rentabilité sera toujours préférée à toute autre possibilité. Notez que les consommateurs ont un rôle important car s’ils se positionnent clairement dès maintenant pour les produits de qualité et fabriqués en France (en se renseignant systématiquement sur internet avant tout achat important) les priorités des entreprises changeront naturellement. Certains argumenterons que les produits de qualité coûtent chers, ce n’est pas toujours le cas (d’où l’intérêt de se renseigner) et dans le calcul de coût du produit acheté, sa durée de vie réelle est un point fondamental.

Qu’en déduire ? Si vous avez des investissements important ou critiques à faire, faites-les maintenant en vous renseignant amplement avant, il sera bientôt un peu tard (du moins pour certaines marque et produits). Réagir ainsi est «également bon pour une « éventuelle » (on ne sait plus maintenant) reprise économique…


[1] Réduction du personnel. Mot anglais utilisé prétentieusement par certain manager. On touche là aux limites du management, car de telles solutions, si simples n’auraient, finalement, pas besoin d’un dirigeant trop bien payé pour les prendre mais pourraient être prises par un logiciel !

samedi 20 février 2010

Les raisons de la chute de l’industrie Française

Est disponible, depuis peu, un rapport sur la désindustrialisation en France par Lilas DEMMOU Chargée de Mission à la Direction Générale du Trésor et de la Politique Économique du Ministère de l’Économie, de l’Industrie et de l’Emploi. Si ce texte n’est qu’un simple rapport de recherche, il nous éclaire néanmoins très bien sur l’état actuel de l’industrie en France et de son évolution ces dernières années et dans le futur.

Il est clair que des données chiffrées manquaient. On apprend donc que « l’industrie a perdu 36 % de ses effectifs entre 1980 et 2007, soit 1,9 million d’emplois ou encore 71 000 par an » principalement dans l’industrie manufacturière. Pour expliquer ce recul impressionnant trois hypothèses principales sont évoquées (en gras) :

  • Recours croissant vers une externalisation (sur le territoire) des services qui représenteraient 25% des pertes d’emploi industriels entre 1980 et 2007. Ainsi en 1980 l’externalisation serait de 9% et de 25% en 2007. Elle concernerait toutes les branches industrielles. L’externalisation de la production serait plus limitée pour l’automobile et l’énergie, mais ces derniers externaliseraient beaucoup de services (avec les biens de consommation). Cette externalisation aurait connu un coup de frein ces dernières années.
  • Les gains de productivité ont impliqué une baisse de la demande. Les gains de productivité font baisser les prix des produits industriels. Mais si cette baisse des prix n’est pas compensée par une hausse de la consommation équivalente, cela implique une destruction d’emplois. Il semblerait que ce déséquilibre ait été atteint en France en 1960. Ce phénomène est dû au fait que le ratio entre le revenu et la consommation en produits industriels n’est pas linéaire mais en U inversé. Pourtant le secteur industriel a plus de possibilité de gains de productivité que les autres mais la baisse importante des biens industriels qui en résulte n’est pas suffisante pour stimuler d’autant la croissance de la consommation de ces biens

Ces points conjugués indiqueraient qu’un transfert vers les services de 25% des emplois perdus aurait eu lieu. Ceci indique une perte d’emploi non pas de 36% mais de 28,42% dans le secteur industriel.

  • La concurrence étrangère et l’ouverture des frontières commerciales contribueraient à une perte de 13% à 45% (suivant la méthode d’évaluation) 1980 et 2007. Perte qui s’est accélérée les 10 dernières années (perte de 20 à 63%) en particulier à cause de la concurrence entre pays développés.
    • La plus forte croissance économique des années 1985 et 1995 n’a fait que ralentir la tendance sans l’inverser
    • En contrepartie, les services commerce, transports, finances, immobilier, aux entreprises et aux particulier ont subit une augmentation de 53% de leur emploi
    • Les secteurs les plus touchés sont les biens intermédiaires (41%), biens de consommation (29%) et d’équipement (18%), l’automobile (7%), l’énergie (4%), l’agro-alimentaire (0,3%). Pourtant c’est la branche biens de consommations (52% en 25 ans) et automobile (40%) qui ont perdu le plus d’emplois.

Une partie de ces pertes d’emplois ont été transférées vers les services. L’évolution de la part de l’industrie dans l’emploi dépend du différentiel de gains de productivité entre l’industrie et les services.

Si les gains de productivité permettent des prix plus bas et donc une consommation accrue ainsi qu’un transfert plus important vers les services, cela n’est toute fois pas suffisant et finalement implique la destruction de 29% d’emplois industriels. Pour vulgariser l’information, la proportion des biens industriels dans l’usage que l’on fait de notre revenu diminue à partir d’un certain niveau de revenu. Pourtant, ce phénomène n’est pas irréversible, comme l’indique cette étude : « il dépend de la qualité des biens et de leur innovation technologique » comme le soulignait déjà mon article sur les ingénieurs.

L’ouverture des frontières commerciales est passée de 11,5% à 18%. Dans le même temps le solde extérieur industriel est passé de -15Md€ à -54Md€ soit –360% de dégradation ! Cette ouverture expliquerait jusqu’à 45% des destructions d’emplois (dont 17% relatifs aux pays émergeants).

  • Pour réduire ce chiffre il faudrait que nous produisions et exportions des produits différents de ceux que nous importons. Les produits manufacturés perdent les plus d’emplois tandis que l’agro-alimentaire en bénéficierait
  • La concurrence des pays à bas coûts explique moins de la moitié des pertes d’emploi dû à la concurrence internationale
  • La majeure partie du recul de l’emploi industriel est due à la perte de compétitivité de la France

Conclusion de l’étude

Nous en déduisons que la destruction d’emplois industriels (non transférés vers les services) est croissante depuis l’an 2000 (de 1 à 5% depuis 2000). L’impact néfaste des gains de productivité s’est accéléré depuis l’an 2000 également (65% depuis 2000). La compétitivité de la France est en chute depuis 1990 (de 20% à 65% des emplois perdus depuis 2000). Nous indique que nous subissons de plus en plus la concurrence des pays développés et dans une moindre mesure celle des pays en développement.

Notons que la dégradation de la compétitivité de la France n'a pas encore complètement impacté l’emploi. De plus la situation est variable suivant le niveau de qualification des travailleurs. Un agrandissement de la fracture sociale et du chômage en prévision ?

Solutions possibles

L’article ne donne pas de solution et se contente de constats ce qui est regrettable. En revanche les conclusions sont suffisamment claires pour qu’on en déduise les contre-mesures (par ordre de priorité) :

  1. Augmenter la compétitivité de la France par la baisse du coût du travail, l’amélioration du niveau d’éducation et des infrastructures
  2. Spécialiser la production manufacturière Française de manière à en réduire la concurrence (comme savent si bien le faire les Allemands)
  3. Réduire l’ouverture extérieure Française surtout tant que les deux points précédents n’ont pas encore portés leur fruits.

Il est a noter qu’il est fondamental pour les entreprises modernes de « maîtriser tous les facteurs de la création de valeur-client » comme l’indique Jacques Léger, auteur de « l’Avenir de notre industrie ! ».

Dans un article (« Industrie, le retour des vieilles lunes ») parut dans « La tribune » de ce samedi, Erik Izraelewicz indique trois fausse solutions à la crise qui accélèrerait notre désindustrialisation :

  1. Une vision nostalgique de l’industrie avec comme exemple Apple qui crée au US mais fabrique en Chine. « L'industrie de demain, c'est un mélange de manufacture et de bureaux d'études, de matériel et d'immatériel. »
  2. L’État peut sauver l’industrie. Le FSI est cité en exemple d’une attente trop forte et irrationnelle de l’état. Il cite comme je l’indiquais dans un récent article les mauvais choix low-cost de Renault comparés aux bons choix haut de gamme des Allemands BMW et Mercedes. L’attitude soudée de ces derniers (entre industriels et entre industriels et syndicats) est soulignée.
  3. La préférence nationale est une solution. « Si politique industrielle il doit y avoir, elle ne peut plus être aujourd'hui qu'à un niveau régional - celui de l'Europe pour la France »

Cette sympathique vision libérale est bien belle mais ne résous rien. Les « vielles lunes » peuvent encore nous éclairer comme nous allons le voir !

Apple est un bel exemple mais un pays ne peut pas avoir que des services ou des bureaux d’étude, il faut donc tout de même s’occuper fortement de l’industrie qui souffre en ce moment. Attention à ne pas avoir une France sans usine, ce qui réussit si bien en ce moment à Alcatel-Lucent et Dell (sic).

L’État ne peut pas tout, certes, mais peut influer fortement sur la compétitivité de la France (voir les solutions possibles ci-dessus) et aider notre pays à se structurer en pôles de compétitivité. Durant ces vingt dernière années, il n’y a eu aucun accompagnement de l’État concernant la stratégie industrielle, nous en voyons aujourd’hui le résultat !

Quant à la préférence nationale, fortement combattue par les libéraux de tous poils, qui, entre parenthèse, avec leurs solutions toutes faites, nous ont conduits dans cette impasse, si elle n’est pas LA seule solution devrait être un point important de notre stratégie.

  • En effet, nous avons vu l’impact de l’ouverture croissante de la France sur l’emploi dans cette étude. « Les très grandes entreprises du Cac 40, qui produisent au moins cher pour vendre sur tous les marchés, s’en accommodent. Mais en France, les PME, qui ne peuvent se redéployer à toute vitesse, disparaissent » indique Pierre Gattaz, président de Radiall et auteur d’un ouvrage intitulé « Le Printemps des magiciens ». Doit-on rappeler que les PME sont le plus grand employeur de France et que la restauration notre compétitivité passera par elles ?
  • Pourquoi accepterions-nous des produits étrangers qui ne respectent pas le centième des règles et normes que nous nous imposons ?
  • Quant à l’Europe, nous voyons hélas, qu’elle a été mal construite et qu’elle nous impose plus de contraintes que d’avantages !

Notez également qu’un pays comme la Chine ne se prive pas de protectionnisme déguisé malgré leur forte croissance. A moins que cette dernière ne soit en partie expliquée par cela…

vendredi 19 février 2010

La dictature commence-t-elle par le numérique ? (mise à jour)

Alors que le monde entier reconnait l’inefficacité des mesures techniques pour lutter contre la grosse délinquance et le terrorisme, le gouvernement se lance, lui, dans une politique du « tout répressif » qui ne laisse aucun doute sur son manque d’efficacité mais laisse en revanche beaucoup de doutes sur les motivations cachées de cette loi votée ce mardi 16 février à l’Assemblée Nationale. Comme le texte est ennuyeux et long au possible (123 pages), peu de gens ont fait l’effort de le lire, mais le blog économique et social s’est dévoué.

  • Le développement de la vidéosurveillance (qui étrangement s’appelle maintenant vidéoprotection dans le texte de loi) pour prévenir des risques terroristes, site vitaux et intérêt fondamentaux de la nation. C’est suffisamment vague pour permettre d’en mettre partout. Si l’état pourra financer 50% des frais d’installation, les coûts d’exploitation sont à la charge des communes. Notons également que des agents privés conventionnés peuvent également dépouiller ces enregistrement. Une commission nationale de la vidéoprotection gèrera ce système. Efficacité ? Très controversée comme le montre de nombreuses études. Effets indésirables ? Favoriser des entreprises privées d’installation et d’exploitation de ces réseaux. Limitation ? On ne peut pas tout surveiller et cela déplacera la criminalité vers des lieux sans caméra. Sans parler du coût global que cela représente et de l’ajout d’une nouvelle commission (comme si nous n’en avions pas assez).
  • Un nouveau délit d’usurpation d’identité[1] est créé. Efficacité ? Faible, la plupart des problèmes étant liés à des voleurs étrangers. Effets indésirables ? La loi est trop floue et pénalise un simple usage de l’identité d’un tiers ou de « données de toute nature permettant de l’identifier » en vue de « troubler sa tranquillité ». Ainsi l’usage d’une vidéo, d’une photo, une caricature mais aussi d’un nom ou même d’un surnom ou d’un pseudo semblent entrer dans le cadre de cette loi. Ainsi critiquer un homme connu, un politicien ou le chef de l’état troublerait sans aucun doute sa tranquillité et tomberai sous le coup de la loi. Limitation ? Aucune, la formulation est si vague que cette loi peut servir à de nombreuses choses comme empêcher les humoristes, journalistes, et même les blogueurs de s’exprimer. On ne peut s’empêcher de penser aux affaires des banderoles « casse-toi pauvre con », aux hommes politiques filmés à leurs insu et qui déclarent que quand il y a un auvergnats ça va, c’est quand il y en a beaucoup qu’il y a des problèmes.
  • Des mouchards informatiques[2] pourront être discrètement installés sur les ordinateurs de suspect (qu’est-ce qu’un suspect ?) afin d’intercepter la frappe au clavier, les emails, chat, sites consultés et fichiers téléchargés. Efficacité ? Nulle pour les grandes organisations criminelles et terroristes, nous avons tous vu que malgré la puissance technologique des Etats-Unis, le 11 septembre n’a pas été évité. Effets indésirables ? Surveiller les opposants, journalistes, syndicalistes, militants, etc.… Avec ce genre de possibilité, c’est l’affaire d’espionnage de Greenpeace par EDF qui est légalisée (EDF étant une entreprise d’intérêt national possiblement déstabilisée par l’association). Limitation ? Seul un juge d’instruction peut décider de l’usage d’un mouchard. Juge d’instruction dont la disparition est programmée… Qui décidera ensuite ? Quand à la nature des infractions justifiant un tel usage d’espion ils sont vastes[3] et modifiables discrètement.
  • Blocage obligatoire par les fournisseurs d’accès d’une liste sites pédopornographiques. Efficacité ? Cette mesure ne changera pas les habitudes des détraqués sexuels qui trouveront vite comment la contourner. De nombreuses études montrent son inefficacité[4]. Intérêt possible ? La liste de site est principalement limitée à la pédopornographie mais pourra aisément évoluer vers ce que le gouvernement veut. Filtrage de site politiques, syndicaux, d’opposants… Limitation ? Cela va couter cher aux fournisseurs d’accès (62 millions d’euros si l’on en croit l’expérience australienne) et va surement augmenter les prix des abonnements ou vos impôts. La liste est donnée par le ministère de l’intérieur donc à géométrie variable.
  • Les agents de Police municipale pourront obtenir le statut d’Officier de Police Judiciaire mais rendrons compte à la police ou la gendarmerie. Ceci permettrait d’effectuer arrestations, des perquisitions, de recueillir des indices et preuves, d’établir des procès verbaux et de notifier des décisions de justice. Efficacité ? Mauvaise à très mauvaise car obtenir un statut ne permet pas d’obtenir les formations nécessaires. Intérêts possibles ? Permettre l’élimination d’encore plus de fonctionnaires de police (comme cela a déjà commencé) au profit d’administrations territoriales. Limitations ? De nombreuses bavures sont en perspective et l’augmentation des impôts locaux paraît inévitable.
  • Le croisement de fichiers policiers est permis pour la lutte de la petite et moyenne délinquance. A noter que les victimes sont également fichées. Efficacité ? Médiocre quand on voit déjà l’obsolescence des fichiers existants. Intérêt possible ? Augmenter le pouvoir de la police et la pression sur les individus en stockant toute information (y compris obsolète) pour une durée indéterminée. Limitations ? Des fichiers faux et obsolètes, s’ils peuvent permettre des pressions sur les individus ne permettront pas normalement leur condamnation devant un tribunal.
  • Dans les cas de récidive de délits routiers (alcool, drogue, conduite sans permis), le véhicule sera confisqué. Efficacité ? Forte pour les gens pauvre mais complètement inefficace sur la grosse délinquance et les riches. Intérêts possibles ? A part la confiscation de véhicules de petits délinquants, l’autre intérêt est une source de revenu supplémentaire pour le gouvernement, avec une estimation de 20 000 confisqués par an, la somme récupérée peut être coquette. Limitation ? La grosse délinquance et les personnes riches ne seront que peu affectées.
  • Les préfets pourront décréter un couvre-feu pour les mineurs de moins de 13 ans. De plus un contrat de responsabilité parentale sera signé avec les parents. But : Supprimer les avantages sociaux des parents qui ne sont pas suffisamment responsables de leur enfants
  • Encadrement des sociétés d’intelligence économique. Efficacité ? Non mesurable si l’on ne sait pas l’objectif de la mesure qui tombe comme un cheveu sur la soupe. A part garantir la souveraineté de la police.
  • Augmentation de 7 à 10 ans de prison de la peine encourue pour vols avec violence sur personnes vulnérables. Efficacité ? Nulle car 10 ans ne seront pas plus dissuasifs que 7 ans. Intérêts possibles ? Aucun, c’est une mesure opportuniste dictée par l’actualité[5]. Limitation ? Aucune, loi inutile.

Divers autre mesures en vrac !

  • Sont maintenant punis les personnes créant des sites de nature « à inciter des mineurs à se livrer à des jeux les mettant physiquement en danger ».
  • Traitement en base de donnée des empreintes génétiques 
  • Autorisation des scanners corporels
  • Renforcement des peines sanctionnant la révélation des identités d’agents de renseignement
  • « Entraver le déroulement des débats d’une assemblée parlementaire ou d’un organe délibérant d’une collectivité territoriale » sera punis
  • La distribution d’argent sur la voie publique (ou toute publicité annonçant un tel évènement est sanctionné
  • La vente à la sauvette est sanctionnée
  • « Le montant au-delà duquel le paiement pour l’achat au détail des métaux ferreux et non ferreux ne peut être effectué en espèces » sera fixé par décret
  • « Le fait de troubler la tranquillité du voisinage par une occupation en réunion des espaces communs ou des parkings souterrains ou des  toits des immeubles collectifs d'habitation ayant pour effet de perturber l'accès ou la libre circulation des personnes est  puni de l’amende prévue pour les contraventions de cinquième classe. »

  • Le conducteurs en état d’ébriété pourront se voir imposer, à ses frais, l’installation d’un système d’anti-démarrage par éthylotest sur leur véhicule

  • Les échanges et vente de points du permis de conduire seront sanctionnés

  • Les établissements de nuit vendant de l’alcool devront disposer de systèmes de dépistage de l’imprégnation alcoolique

  • La mesure des vitesses moyennes par radar entre deux points de parcours est autorisée

  • Les actes de justice pourront être fait par téléconférence

  • Création de la réserve civile de la police nationale (retraités des corps actifs de la police nationale)

Qu’en déduire ?

Il est évident que ce texte va permettre de décharger la police au profit de la police municipale et de société de surveillance privée (vidéosurveillance). Un surcoût non négligeable sera transféré sur les impôts locaux et vers les abonnements internet. Internet sera mis au pas avec la possibilité de surveillance discrète de toutes les communications, le filtrage d’une liste extensible de sites et la protection de l’honneur et de la tranquillité des personnes (inconnues et surtout connues). Le croisement des fichiers policier rendra plus efficace les mesures ci-dessus. De plus quelques mesures clientélistes sont venues se greffer (violences aux personnes vulnérables, couvre-feu pour les mineurs, …)

En pratique les mesures ci-dessus sont définies de manière si floues que tous les abus seront permis et que cela ressemble au « patriot act » français du président. Un acte de guerre délibéré contre internet et ses nuisances supposées ou réelles, officielles ou officieuses. Malheureusement, comme le « Patriot Act » l’efficacité de ce texte est assez compromise.

Si vous êtes investisseur, je vous conseille vivement d’investir dans des sociétés de vidéosurveillance (oups, je voulais dire de vidéoprotection), de matériel de filtrage de l’internet, de data-centers, et de logiciels et matériels de surveillance, d’anti-démarrage par éthylotest, de radars, de téléconférence, de scanners corporels et de génétique. Leurs actions vont bientôt exploser en France !

Il est néanmoins bien triste de voir la France, historiquement défenseur des droits de l’homme, se lancer dans l’aventure de la censure du web, telle que n’importe quelle dictature que nous savons si bien critiquer par ailleurs.

La Dictature a déjà commencé avec le filtrage de sites politiques

L’assemblée Nationale a été la première a connaître les joies du filtrage du net et déjà c’est discutable. Bien sûr les sites pornographiques divers sont bloqués. En partie seulement car, comme le révèle Bakchich, il y a de gros trous. Plus problématique : certains sites politiques font partie du lot ainsi le site Semaine Anticoloniale 2010, franchement anti-Sarkozy, est également filtré pour raison de site malveillant. La censure politique est donc déjà là, j’en ai marre d’avoir toujours raison !


[1] « Art. 222-16-1. – Le fait de faire usage, de manière réitérée, sur un réseau de communications électroniques, de l’identité d’un tiers ou de données de toute nature permettant de l’identifier, en vue de troubler la tranquillité de cette personne ou d’autrui, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

« Est puni de la même peine le fait de faire usage, sur un réseau de communications électroniques, de l’identité d’un tiers ou de données de toute nature permettant de l’identifier, en vue de porter atteinte à son honneur ou à sa considération. »

[2] « Art. 706-102-1. – Lorsque les nécessités de l’information concernant un crime ou un délit entrant dans le champ d’application de l’article 706-73 l’exigent, le juge d’instruction peut, après avis du procureur de la République, autoriser par ordonnance motivée les officiers et agents de police judiciaire commis sur commission rogatoire à mettre en place un dispositif technique ayant pour objet, sans le consentement des intéressés, d’accéder, en tous lieux, à des données informatiques, de les enregistrer, les conserver et les transmettre, telles qu’elles s’affichent sur un écran pour l’utilisateur d’un système de traitement automatisé de données ou telles qu’il les y introduit par saisie de caractères. Ces opérations sont effectuées sous l’autorité et le contrôle du juge d’instruction.

« Art. 706-102-5. – En vue de mettre en place le dispositif technique mentionné à l’article 706-102-1, le juge d’instruction peut autoriser l’introduction dans un véhicule ou dans un lieu privé, y compris hors des heures prévues à l’article 59, à l’insu ou sans le consentement du propriétaire ou du possesseur du véhicule ou de l’occupant des lieux ou de toute personne titulaire d’un droit sur celui-ci. S’il s’agit d’un lieu d’habitation et que l’opération doit intervenir hors des heures prévues à l’article 59, cette autorisation est délivrée par le juge des libertés et de la détention saisi à cette fin par le juge d’instruction. Ces opérations, qui ne peuvent avoir d’autre fin que la mise en place du dispositif technique, sont effectuées sous l’autorité et le contrôle du juge d’instruction. Les dispositions du présent alinéa sont également applicables aux opérations ayant pour objet la désinstallation du dispositif technique ayant été mis en place. »

[3] Meurtre, torture, enlèvement, vol, destruction, délits d’armes et explosifs en bande organisée, trafic de stupéfiants, traite des humains, proxénétisme, fausse monnaie, terrorisme, aide d’étrangers en situation irrégulière, blanchiment et recels, association de malfaiteurs, délit de non-justification de ressources correspondant au train de vie.

[4] Les cabinets d'étude, Marpij et Insight, ont réalisés une étude d'impact sur le filtrage pour la Fédération française des télécoms, l’étude démontre que toutes les techniques de blocage, "sans exception aucune, sont contournables".

[5] Le 29 janvier un couple de septuagénaires ont été tués de 87 coups de couteau.

Quels sont les articles les plus envoyés ?

Un article du New York Times a retenu mon attention. Un groupe de chercheurs de l’Université de Pennsylvanie ont étudié une liste des articles les plus envoyés par email du New York Times. Il ont effectué cette analyse en vérifiant le site web du New York Times toute les 15 minutes durant 6 mois. Le résultat est assez intéressant.

Les articles les plus partagés sont :

  • Les articles suscitant une émotion à dominante positive sont préférés aux articles négatifs
  • Les articles longs ont plus de chance d’être choisis car ils sont souvent plus profonds dans leur analyse et donc plus valorisant pour le lecteur
  • Les articles inspirant admiration, élévation de l’esprit sont également choisis. Surtout si ces articles permettent au lecteur de voir le monde différemment. Ils sont partagés entre amis dans l’espoir de recevoir en retour d’autres articles du même style. La motivation peut être aussi de montrer combien nous sommes bien informés en envoyant des articles surprenants à ses proches
  • Les articles sur des sujets qui impressionnent et/ou qui offrent un défit intellectuel sont également partagés
  • Les articles scientifiques ont également du succès, notamment ceux qui inspirent l’espoir. Ils permettent de montrer a nos amis que nous avons un bon niveau scientifique et ainsi de nous valoriser. Il permettent de partager une idée ou une émotion dans son cercle de connaissance et de renforcer encore les liens qui nous unissent a eux

dimanche 14 février 2010

Xin Nian Kuai Le !

xin_nian_kuai_le1

C’est le nouvel an pour des milliards de Chinois. Bonne année a tous.

samedi 13 février 2010

Hexaconso : J’en ai rêvé, elle l’a fait !

51 - MadeInFrance

Lorsque j’ai écrit l’article sur les délocalisations en France, on m’a soumis un site intéressant www.hexaconso.fr dont le rôle est de présenter les entreprises qui ont encore une partie (ou la totalité) de leur fabrication en France. J’ai voulu en savoir plus, voici l’interview de sa créatrice, Marie Thuillier.

Eugène : Pouvez-vous présenter rapidement le site Hexaconso ?

Hexaconso : Hexaconso présente aux consommateurs les marques qui fabriquent vraiment leurs produits en France. Il permet aussi aux entreprises de faire connaître leurs marques et produits à des personnes à la recherche d'une consommation un petit peu plus responsable, et également de communiquer sur leurs engagements en matière d'emplois, d'environnement…

Modestement, Hexaconso espère pouvoir ainsi contribuer ne serait-ce qu'un tout petit peu à la nécessaire sauvegarde d'une industrie française en grand danger.

Eugène : Quand à été créé le site Hexaconso ?

Hexaconso : L'histoire d'Hexaconso remonte à déjà 3 ans, puisque les premiers germes en sont apparus début 2007. Mais après plusieurs versions graphiques, le site a vraiment démarré à l'automne 2009.

Eugène : Comment vous est venue l'idée de ce site ?

Hexaconso : Ingénieur de formation (les Mines de Nancy), complétée par un troisième cycle en gestion d'entreprises, j'ai toujours travaillé dans le conseil aux entreprises et aux collectivités territoriales. Tout d'abord au sein de structures consulaires (CCI), puis territoriales (locale et régionale), à chaque fois dans ce que l'on appelle le « Développement économique et industriel ». En 2002, j'ai créé ma société de conseil, toujours en développement économique et industriel, pour les collectivités territoriales et les institutionnels.

C'est ainsi que j'ai été amenée à rencontrer un certain nombre d'entreprises, souvent industrielles, ainsi que des territoires plus ou moins en souffrance économique, certains même totalement sinistrés suite à quelques naufrages industriels aux conséquences dramatiques pour l'emploi local. Nous dirons donc que mes études puis ma vie professionnelle étaient assez orientées vers l'industrie.

Mais revenons à Hexaconso, et à sa genèse. Entre des territoires ravagés par la disparition quelque fois totale de leur industrie, des filières industrielles entières (par exemple la lunette dans le Jura) dont les effectifs et les savoir-faire disparaissaient à vue d'œil en raison de la généralisation du recours à la sous-traitance asiatique, et des entreprises tenaillées par la nécessité d'être toujours plus compétitives, le bilan industriel et territorial qui se dessinait commençait sérieusement à virer au drame.

Plus personnellement, à commencer à naître l'horrible sensation de me faire avoir, financièrement et philosophiquement, en achetant, à des prix loin d'être négligeables, des articles : (rayer la mention inutile)

- De qualité plus que médiocre. Du vécu : repasser un tee-shirt informe, aux coutures qui « tournent » et au col qui baille après deux lavages est un calvaire, et essayer de faire des travaux dans sa maison avec du matériel « pas cher », c'est courir le risque  de voir le moteur griller au bout de 2 ou 3 heures maximum de fonctionnement…

- De marque mondialement connue, mais dont la fabrication est plus que douteuse (fabriqués par des enfants ou des quasi-esclaves)

- Dont la fabrication est, écologiquement parlant, aberrante (les 7000 litres d'eau pour faire un jean pré-troué, ou les 9000 km parcourus par un bête yaourt à la fraise)

Vous combinez ces deux approches (personnelle et professionnelle), et vous aboutissez à la conclusion qu'il y a un truc qui ne tourne plus rond, que nous marchons tous collectivement sur la tête. Et que vous n'avez, en tant que citoyen et/ou consommateur, aucun accès à une information indépendante, fiable et centralisée sur qui fabrique quoi, comment et où. Et comme depuis 1986 les entreprises n'ont plus d'obligation concernant la mention de l'origine de production de leurs produits, on ne peut même plus se fier à l'étiquetage. D'ailleurs, à ce sujet, l'usage, mais ce n'est qu'un usage, permet d'inscrire « Made in France » sur une étiquette dès que 45 % de la valeur ajoutée est produite en France. Ce qui ne veut absolument rien dire sur la fabrication réelle du produit. Il suffit de faire fabriquer pas cher un produit « brut » et de l'assembler, le « décorer », ou de le peindre pour pouvoir l'orner d'une jolie étiquette « Made in France ».

Puis vous vous dites que zut (pour rester polie), il reste quand même un paquet d'entreprises françaises, qui privilégient la qualité (en général), et qui n'ont encore pas tout délocalisé ou sous-traité dans les fameux pays à bas coûts de main d'œuvre. Et là, rien, rien sur le net, rien dans les médias, aucune information.

L'idée de rassembler en un endroit unique l'information sur les marques qui fabriquent leurs produits en France était née. J'ai bien dit l'idée…

Parce que l'accueil des personnes avec qui j'ai évoqué le sujet à l'époque a été au mieux froid, au pire j'ai eu droit au classique : « Quoi ! Mais c'est une idée franchouiallarde, tendance Le Peniste ton truc ! » J'ai laissé dire et ai donc remisé cette idée au fond de mon petit cerveau jusqu'à ce qu'elle ressorte fin 2008. Hasard ou coïncidence : la fameuse crise mondiale éclate. Me disant que c'était maintenant ou jamais, j'ai donc commencé à conceptualiser ce qui était encore mal défini, puis je me suis lancée.

Plus personne aujourd'hui ne me parle de démarche franchouillarde. Bien au contraire… Comme quoi, les mentalités sont peut-être en train d'évoluer…

Eugène : Quel sont les objectifs du site ?

Hexaconso : A l'origine de ce site était l'idée de centraliser en un seul et même endroit les marques dont les produits étaient fabriqués en France. Hexaconso s'adresse ainsi aux consommateurs, et concerne leurs achats de la vie courante : vêtements, cosmétiques, décoration, arts de la table, articles pour les sports et les loisirs, outillage… Et également un peu de gastronomie, même si je ne souhaite pas recenser tous les petits producteurs, d'autres sites spécialisés le faisant déjà très bien. En revanche, les marques agroalimentaires à dimension un peu industrielles, mais avec un aspect « produit régional » ont tout leur place sur le site. Plus tout à fait artisanales, mais pas non plus impersonnelles ou détachées des traditions régionales, ces marques ont en général une histoire et des savoir-faire intéressants.

L'objectif majeur est donc d'informer le consommateur, de lui présenter des marques sous l'angle « produits », mais également en racontant un peu de leur histoire, et en leur présentant leurs savoir-faire. Pour aller plus loin justement que les produits, et faire découvrir ce qu'il y a « en coulisse », derrière, dans l'atelier ou l'usine.

Dans le même esprit d'information du consommateur, j'ai d'ailleurs créé une Blacklist, dans laquelle je recense à l'occasion les entreprises qui ont fini par délocaliser entièrement leur production, mais continuent d'entretenir leur image « française » en jouant sur les mots, notamment en rajoutant le mot « France » dans leur logo, ou en parlant de leur « fabrication dans le respect de la tradition française » sur leur site internet… Comment ne pas avoir envie de les épingler, lorsque leur fameuse tradition française s'exprime en mandarin et que leurs produits ont parcourus des milliers de kilomètres sur des cargos poubelles. Il arrive régulièrement que des visiteurs d'Hexaconso m'écrivent en me signalant une marque bien française que je devrais, selon eux, faire figurer sur le site. Deux fois sur trois, ces personnes sont bien déçues de ma réponse : l'entreprise dont ils me parlent fabriquait bien en France, mais c'était avant…

Symétriquement, le deuxième objectif est de fournir un espace d'expression aux entreprises qui fabriquent vraiment en France, afin qu'elles partagent avec les consommateurs un peu de leur histoire et de leurs engagements, qui sont souvent importants, tant sur le plan environnemental ou écologique, que sur le plan social ou citoyen.

Ces deux objectifs sont ceux que j'avais imaginés à l'origine. Aujourd'hui que l'actualité et les médias se font l'écho de façon beaucoup plus importante des thèmes liés à l'industrie, les délocalisations, le « Made in France » ou encore le protectionnisme, j'envisage d'apporter un peu plus de « contenu » au site. Je réfléchis à la création d'une page où je pourrais présenter ma vision de l'économie et de l'industrie en France. Peut-être un peu ambitieux, peut-être un peu dangereux, mais il y a tellement de choses que je lis et que j'entends qui me hérissent le poil, que j'ai fortement envie de m'exprimer sur l'importance de garder une industrie de production dans notre pays, sur le protectionnisme (quasi gros mot jusqu'il y a peu)…

Eugène : Comment sont répertoriés les entreprises sur le site ? Il faut que les entrepreneurs s'inscrivent ou vous faites vous-même vos propres ajouts ?

Hexaconso : Au départ, j'ai bien sûr commencé avec les entreprises que j'avais pu connaître dans ma vie professionnelle. La liste s'est ensuite élargie avec les entreprises que je « repère » en lisant la presse économique, industrielle, locale ou régionale, en parcourant le net de long en large. Mon entourage et mes contacts professionnels ont également pris l'habitude de me communiquer les noms d'entreprises potentiellement compatibles avec ma démarche. Il s'agit ensuite de valider ou non leur adéquation avec la ligne d'Hexaconso, de les contacter…
Aujourd'hui, je suis également régulièrement contactée, via le site, par les entreprises elles-mêmes, qui souhaitent être référencées. Hexaconso faisant doucement son chemin dans l'univers impitoyable du web, le nombre de ces contacts directs augmentent petit à petit (en moyenne, quasiment 1 par jour ces derniers temps).

Eugène : Comment est financé le site ?

Hexaconso : Voici LE point crucial de tout site internet : comment le financer ? J'ai bien sûr envisagé de le faire par de la publicité. Mais ce principe me pose quelques problèmes. Déontologiquement, je ne souhaite pas par exemple diffuser de la publicité pour de grandes boutiques dont la plupart des produits vendus sont fabriqués « ailleurs ».
Parallèlement, Hexaconso offre un service aux entreprises, en leur proposant un espace de communication au sein duquel elles peuvent s'exprimer. Elles peuvent ainsi se situer à la fois dans une démarche commerciale en présentant leurs produits, et également dans une démarche de communication liée à leur image et à leurs valeurs en mettant en avant leurs engagements d'entreprises citoyennes et/ou impliquées dans la protection de l'environnement par exemple.
Il ne me semble donc pas anormal qu'Hexaconso puisse tirer ses ressources des espaces vendus à ces entreprises. Voilà pourquoi le schéma financier s'appuie sur un « abonnement » acheté par les entreprises souhaitant être référencées sur le site. Les tarifs proposés aux entreprises sont donc modérés, afin que toutes puissent, si elles le veulent, y avoir accès, et qu'ils ne soient pas discriminants, même pour les plus petites d'entre elles. L'abonnement annuel est ainsi actuellement proposé à 100 € HT. L'évolution de la structure d'Hexaconso me conduira peut-être à réévaluer ce tarif, mais je ne souhaite pas aller au-delà de 200 € HT/an. Encore une fois, l'objectif est de permettre au plus grand nombre d'entreprises d'être en mesure de figurer sur Hexaconso lorsqu'elles remplissent les conditions nécessaires.
A ce jour, l'accueil des entreprises est d'ailleurs plutôt très favorable.

Eugène : Quelles sont les difficultés de cette approche ?

Hexaconso : Le point le plus délicat est le temps que demande le contact avec les entreprises. C'est d'ailleurs pour cela que j'envisage de renforcer l'équipe. L'autre point important concerne la visibilité d'Hexaconso sur internet. Le référencement, le trafic, le « buzz »… sont des éléments cruciaux dans la vie d'un site. Cet aspect d'Hexaconso est actuellement confié à un spécialiste. Je souhaite ainsi pouvoir consacrer plus de temps à l'expression et à la diffusion de mon engagement pour la promotion de l'industrie française.
Ce qui est sûr, c'est que la fréquentation du site est en très nette augmentation, et qu'une interview telle que celle-ci est une véritable chance pour Hexaconso. Je vous en remercie d'ailleurs vivement !

Eugène : Quels sont les principes du site et quels sont les critères pour apparaître sur votre site ?

Hexaconso : Le principe de base est qu'Hexaconso ne délivre aucun label, et que la présentation des marques reste sous leur responsabilité. Je ne demande qu'une chose : transparence et honnêteté.

La charte Hexaconso est la suivante : que l'entreprise fabrique la totalité ou une partie identifiable ou identifiée de ses produits en France. Identifiable signifie une partie de la gamme de ses produits. Identifiée signifie une partie de la fabrication même de ses produits.

Je me réserve le droit de refuser une marque qui ne souhaiterait pas mentionner tel ou tel aspect de ses pratiques. Un exemple : une entreprise me contacte via Hexaconso pour savoir comment être référencée. Elle se présente comme étant la seule entreprise de fabrication française dans sa partie. Je vérifie ses dires, et me rends compte qu'elle est effectivement la seule en France à vraiment fabriquer ses produits, mais, car il y a un mais, je vois aussi qu'elle travaille en partenariat avec une entreprise qui fabrique ses produits en Chine. Je lui demande donc la part de ses produits qui intègre ces composants chinois. Pas moyen d'obtenir de réponse, donc pas de référencement sur Hexaconso. J'aurais accepté de la présenter si elle m'avait dit que 20 ou 40 % de ses produits intégraient des composants asiatiques. Mais visiblement, cela lui pose un problème…

Et lorsque je ne trouve pas de renseignement sur l'entreprise en fouinant sur internet, en lisant la presse économique ou industrielle, ou directement auprès de l'entreprise, mon métier de consultante me permet d'avoir accès aux informations via les agences de développement économique locales, départementales ou régionales. Elles connaissent quasiment toutes les entreprises de leur territoire, ou elles connaissent au moins quelqu'un qui les connaît…

Petit point pratique : ayant l'habitude de pratiquer les entreprises, je rédige moi-même leur page de présentation, en respectant bien entendu les éléments qu'elles souhaitent mettre en avant, et ceux qui leur semblent moins importants.
Cette façon de faire permet notamment :

-    De gagner du temps, car je sais que si je leur demande de rédiger elles-mêmes leur texte, de choisir les photos…, elles auront du mal à trouver le temps nécessaire pour s'y consacrer. Gérer une PME implique généralement un emploi du temps plus que serré et rempli. Je leur demande donc simplement de me communiquer les éléments clés de leur entreprise, et j'essaie de restituer le plus fidèlement possible leur démarche, leur histoire, leurs particularités…
-    De maîtriser la ligne éditoriale d'Hexaconso ainsi que la présentation des entreprises, sachant que Leur page ne sera de toute façon pas mise en ligne tant que l'entreprise ne l'aura pas validée. Mais je dois avouer que je n'ai pas, à ce jour, rencontré de difficulté sur ce point.

Eugène : Comment son gérés les cas ou une partie de la production est en France ? Deux cas principaux se présentent : une partie des produits vendus sont fabriqués en France, deuxième cas, une partie de la fabrication de chaque produit est réalisée en France ?

Les entreprises fabriquant 100% de leurs produits en France sont aujourd'hui bien rares. Je demande donc que les éventuelles parties non fabriquées en France soient identifiables ou identifiées. Par exemple, une entreprise qui fabrique des chaussures en réalisant une partie (70 %) de la coupe et de la piqure en Tunisie (soit au total moins de 25 % de la fabrication de la chaussure entière), a tout à fait sa place sur Hexaconso, surtout que la délocalisation progressive de cette partie de la fabrication n'a jamais donné lieu à licenciement, et que l'effectif de l'entreprise a même progressé (l'effectif de production ayant progressé également).

Autre cas, celui où une partie de la gamme de produits est fabriquée en France. Si les produits français sont identifiables (telle gamme, telle famille de produits…), j'accepte de référencer l'entreprise.

Eugène : Que se passe-t-il si la situation de l'entreprise change ? Rachat, délocalisation, etc...

Hexaconso : Je n'ai encore pas eu à traiter le cas où la situation de l'entreprise change. Mais si l'une d'entre elles venait à délocaliser, j'essaierais d'en profiter pour interroger le patron, pour comprendre et savoir exactement qu'elles sont les raisons qui le pousse à prendre une pareille décision. Une délocalisation en direct ! Bon, cela supposerait que l'entreprise coopère… Mais si l'entreprise ne remplit plus les critères d'Hexaconso, je la retire du site.

Eugène : Combien de personnes participent a cette aventure ?

Hexaconso : Conformément à mes bonnes habitudes, j'ai voulu tout faire toute seule au début. Et je l'ai fait, un peu aidée d’abord pour apprendre à créer une page internet, mais c'est tout. Dans mon empressement, je n'imaginais pas le travail que représente la création d'un site internet, mais voilà, le site était opérationnel à l'été 2009. A l'automne, je me suis dit que le design était perfectible, et j'ai tout refait, pour aboutir à la version d'aujourd'hui qui n'est peut-être pas encore parfaite, mais qui me convient mieux.

Je sous-traite quand même actuellement la partie référencement et développement du trafic à un spécialiste. On ne peut pas tout maîtriser… Et j'envisage maintenant de muscler la partie concernant les démarches avec les entreprises (prise de contact, validation de leur production en France, démarche commerciale). Être épaulée me permettrait ainsi de consacrer plus de temps aux messages que je souhaite véhiculer par le biais de ce site. J'y réfléchis.

Eugène : Comment envisagez-vous l'avenir du site ?

Hexaconso : La liste des marques qui pourraient potentiellement figurer sur Hexaconso est encore longue. Et c'est d'ailleurs là une certaine « surprise » : il reste beaucoup d'entreprises qui fabriquent encore leurs produits en France. Et dans tous les domaines. Je vais de découvert en découverte.

Et comme ces entreprises sont souvent des PME ou PMI, elles n'ont pas la force de frappe commerciale et marketing qu'ont les grands groupes. Elles ne sont donc pas facilement identifiables, et peu connues (à quelques exceptions près).

Le premier développement d'Hexaconso est donc de recenser le plus grand nombre de marques, et de proposer ainsi aux consommateurs une palette la plus large possible d'alternatives à la consommation de masse.

Comme je l'ai écrit précédemment, je souhaiterais également apporter un peu plus de contenu à Hexaconso, en approfondissant les aspects économiques et industriels en France, la désindustrialisation, les délocalisations… Pouvoir présenter certains secteurs d'activités, par exemple le secteur du textile, ou de la chaussure, afin de mieux faire prendre conscience aux consommateurs de l'évolution de ces secteurs dans notre économie, de la destruction d'emplois et de savoir-faire…

Eugène : Ne pourrait-on pas imaginer une diversification du concept ? Par exemple s'occuper d'autres pays que la France (internationaliser le site), proposer au visiteurs d'investir dans les entreprises concernées ou permettre tout simplement un achat des produits directement sur votre site (pratique pour les petites PME) ?

Hexaconso : Le développement d'une boutique qui vendrait des produits fabriqués en France n'est pas à l'ordre du jour. Plusieurs sites le font, mais leurs modèles ne me séduisent pas, peut-être est-ce parce que le « concept » est assez nouveau. Mais entre les produits présentés qui ne sont absolument pas fabriqués en France, les produits vendus sans préciser la marque ou l'entreprise qui est censée les fabriquer…, je me dis que le concept n'est peut-être pas encore mûr.

Vous me parlez d'étendre le concept d'Hexaconso à d'autres pays. Oui, je pense qu'il serait judicieux d'étendre le concept au moins à nos voisins directs, ou à l'Europe des 6, des 12 ou des 15. Je ne saurais pas donner à ce jour les contours exacts de ce qui pourrait être une sorte de marché européen homogène en termes de niveau de vie et de niveau de consommation. Mais on passe là à une toute autre dimension, et à la nécessité de lever des capitaux ou de trouver des partenaires à Hexaconso.

Enfin, l'idée de proposer aux particuliers d'investir dans les entreprises est excellente, mais excessivement compliquée à mettre en œuvre, car comme vous vous en doutez, tout ceci est très réglementé, et fiscalement parlant compliqué. L'idéal serait de trouver un partenariat avec un fond d'investissement sensible à la fabrication française et aux PME et PMI. Je vais me mettre sur le sujet…

Eugène : Avez-vous un point ou une information a ajouter par rapport au questions ci-dessus ?

Hexaconso : Le « Made in France » est à l'honneur depuis quelques mois. Je pense que la fameuse crise qui nous agite depuis 2008 n'y est pas pour rien. La médiatisation de quelques uns des plans de licenciements, l'explosion de l'écologie et de la prise en compte de la fragilité de notre planète, tous ces phénomènes se sont combinés pour mettre en exergue le schéma mondial absurde dans lequel nous nous débattons.

Notre système n'a pour effet que d'appauvrir les pays dits « riches », en les dépouillant de leur industrie, notamment. Mais il n'enrichit qu'une toute petite partie des pays dits « émergents ». Le sort des travailleurs chinois, employés dans ces usines au gigantisme hallucinant, ne me semble guère enviable. En revanche, quelques uns deviennent millionnaires (ou plus) en quelques mois, dans le sillage d'un pouvoir que l'on ne peut pas vraiment qualifier de démocratique.

Et croyez vous que ces mêmes chinois vont se contenter longtemps de fabriquer des jouets et des tee-shirts à deux balles ? La Chine forme déjà plusieurs dizaines de milliers d'ingénieurs chaque année. Combien de temps leur faudra-t-il pour maîtriser eux-mêmes les technologies les plus innovantes, surtout lorsque les grandes entreprises françaises, prêtes à n'importe quoi pour leur vendre un avion ou que sais-je d'autre, leur transfèrent directement les technologies nécessaires à la fabrication de nos soi-disant joyaux nationaux.

Sans compter que quelques entreprises feraient, à mon avis, bien de se poser la question de la rentabilité de la délocalisation. On peut en effet s'interroger. Certes le nombre d'entreprises qui ont fait marche arrière, c'est-à-dire qui ont rapatrié en France une production qu'elles avaient auparavant délocalisée dans un pays à bas coût, est assez faible. Mais toutes ont fait l'effort de calculer précisément les coûts réels de leur délocalisation. Et toutes ont le même discours. Les coûts intervenant dans la fabrication d'un produit vont en effet bien au-delà de la main d'œuvre. Il faut également prendre en compte de nombreux autres postes de dépenses : transport, taxes douanières, intermédiaires, encadrement et contrôle sur place, problèmes de qualité, délais de livraison et de réactivité, corruption (certains pays dits « low cost » sont rongés par la corruption – j'ai bien dit certains, pas tous), hausse des salaires sur place (exemple : Roumanie)… La liste est longue, et les surprises souvent au rendez-vous. Un exemple : Gantois, entreprise vosgienne qui fabrique des produits métallique pour l'automobile et l'industrie. La production qui avait été délocalisée en Roumanie a été rapatriée à Saint-Dié. Le calcul des coûts de la délocalisation a été très révélateur : à la base, la main d'œuvre en France revenait à 30 €/heure. En Roumanie, si les salaires sont à 6 €/heure, l'imputation des autres frais engendrés par la délocalisation a permis de calculer que ces salaires revenaient au total à… 36 € de l'heure. Voilà comment, à partir d'une apparente bonne opération, le résultat s'est avéré désastreux. Sans compter l'image de l'entreprise qui en avait pris un coup auprès de ses clients en raison de la qualité médiocre des produits qui étaient fabriqués là-bas. Ou comment perdre de l'argent, et des clients !

Et une fois que tout cela est en marche, que pouvons-nous faire pour l'endiguer ? Boycotts, taxes aux frontières, protectionnisme ? En l'absence de solution miracle, j'ai souhaité apporter ma toute petite pierre à l'édifice, en agissant sur les leviers à ma portée :

- Aider les entreprises qui se battent pour maintenir une production en France à se faire connaître des consommateurs ;

- Aider les consommateurs à identifier les marques qui continuent à produire en France ;

- Tenter de faire prendre conscience aux consommateurs de l'importance de l'industrie dans notre économie.

Eugène : Pensez-vous que la France puisse se passer d’industrie et ne garder que la partie noble comme la recherche et développement ?

Hexaconso : Même si la part des services dans l’économie s’accroît, une industrie solide est nécessaire à un équilibre vertueux de la balance commerciale et à la croissance. En effet, la demande en biens industriels des pays développés reste importante, car elle assure l’essentiel de leur qualité de vie. Si ces biens ne sont pas produits, ils doivent être achetés à l’étranger. Quels services exportables peuvent être la contrepartie de l’achat des biens industriels à l’étranger ? Selon un scénario envisagé par certains auteurs, la France pourrait devenir essentiellement agricole et touristique et acheter ses biens à d’autres pays spécialisés dans la production industrielle. Cette évolution de la spécialisation vers des secteurs à faible valeur ajoutée appauvrirait la France et fragiliserait sa position dans le commerce international. De manière plus générale, l’industrie demeure un des principaux moteurs de l’activité économique en termes de valeur ajoutée et d’emploi. Les territoires qui se développent le plus et qui créent le plus d'emplois sont les territoires où l'industrie est la plus performante. Le marché de l'emploi reste donc tiré de manière importante par les résultats de l'industrie. Et l’industrie possède également un pouvoir très fortement structurant sur la diffusion des innovations technologiques à l’ensemble de l’économie et, par extension, sur sa productivité globale.

En résumé, l'industrie est totalement indispensable à notre économie. Et le fantasme de certains d'une France sans usine, avec juste les fonctions les plus nobles telles que la conception, le marketing… n'a aucun sens. Pourquoi garder ces fonctions là où plus rien ne sera produit, et pourquoi les ingénieurs chinois ne seraient-ils pas capables de concevoir les produits qu'ils fabriqueront ensuite ?

Quand on entend parler d'industrie, on a l'impression que la France industrielle se résume à deux secteurs d'activités : l'automobile et l'aéronautique. Or l'automobile perd des emplois à la vitesse de l'éclair. Selon les experts chargés de travailler pour la commission réunie par C. Estrosi pour le soutien aux sous-traitants, 40 à 50.000 emplois chez les équipementiers automobiles français sont encore en « trop », après en avoir déjà perdu 55.000 depuis 2005. L'automobile est peut-être un secteur d'avenir, mais pas pour les emplois visiblement.

Eugène : Marie Thuillier, merci pour cette très intéressante aventure, je crois que tous les Français qui souffrent de la crise peuvent vous remercier et vous soutenir !

Hexaconso : Merci beaucoup de m’avoir contactée, c’est avec plaisir que j’y ai répondu.

lundi 8 février 2010

Exposition Universelle : la France très attendue

image © Copyright 2010, Eugène

Comme chacun sait l’exposition universelle 2010 aura lieu à Shanghai. Pour l’occasion la ville fait peau neuve au grand désespoir des habitants car pas une seule rue n’est pas en travaux, pas un seul immeuble n’est pas en réfection. C’est un véritable enfer que j’ai découvert cet été, une Shanghai très différente de celle que je connaissais. Particulièrement sur le berges de la rivière Huangpu où les voies de circulations seront transférées sous terre, laissant place a un gigantesque espace piéton. Surement que lorsque les travaux seront terminés la ville sera méconnaissable.

Bref, les Chinois ont vu grand et agissent comme si l’honneur tout entier du pays tenait en cette exposition. Un sondage auprès de 15 000 Chinois indique que le pavillon US est le plus attendu par la population avec 48% d’intensions de visites, mais juste derrière arrive la France avec 38% (32% UK, Japon, 28%: Corée du sud, 25%: Allemagne, 23%: Egypte, Singapour, 21%: Canada, 20%: Italie). C’est donc un magnifique succès pour la France que d’arriver en deuxième position après les états-unis.

Pourquoi un tel engouement ? Il semble que le choix du pavillon a visiter se fasse en fonction de la familiarité des visiteurs avec le pays (90% des sondés le disent). Autre point déterminant : le thème choisi pour le pavillon qui doit refléter la marque de fabrique du pays et le contenu réel du pavillon. L’organisation d’activités culturelles, artistiques, interactives et high-tech est également considéré comme important.

Toutefois, dans le cas de la France, la motivation des visiteurs Chinois semble lié a un capital sympathie (avec le Brésil, l’Australie et Singapour) plus qu’à une attractivité technologique (US, Japon et Allemagne sont vue comme des pôles technologiques). L’Egypte est vue comme un pays de culture et d’histoire tandis que l’Afrique du Sud et l’Icelande sont vus comme des pays touristiques aux paysages naturels magnifiques.

Du point de vue du budget, 60% des visiteurs estiment dépenser plus de 1000 Yuan (100 Euros environ) durant l’exposition. Une bonne opportunité pour la France de faire découvrir sa culture, son art (oublié des chinois), de rappeler son attrait touristique et ses paysages et de démontrer que nous sommes également un pays avec des hautes technologies. Le président Français à reçu le ministre des affaires étrangères Chinois ce 4 février 2010 à Paris. Le ministre a indiqué que la France avait une grande influence dans le monde et que la Chine était attachée à ses liens avec la France. La coopération entre les deux pays devrait s’accélérer. La Chine étant un des grands marchés de demain, cette exposition semble capitale.

vendredi 5 février 2010

Quand le travail use…

50 - Burn out

Dernièrement on m’a raconté l’histoire d’un collègue victime d’une hémorragie cérébrale. Hospitalisé dans un état grave, ses jours sont en danger. Il faut savoir que ce genre d’accident laisse peu de place à l’optimisme, comme le montre l’exemple terrifiant de Jean-Paul Belmondo. Quel rapport avec le travail ? Cette personne travaillait sur un projet critique pour l’entreprise. Des collègues proches de lui m’ont confiés que si les derniers mois avaient été épuisants pour lui, son attitude avait fortement changée les cinq derniers jours avant l’accident. Il semblait vidé, épuisé, faible et il ne dormait plus. Il emmenait son ordinateur portable chez lui et continuait à travailler soirs et week-ends au mépris de sa famille et de sa santé. Depuis son hospitalisation, son état a empiré il a finalement il a attrapé une infection nosocomiale. Si toute l’entreprise pense à son épouse, nous nous trouvons tout simplement démunis et choqués.

Voulant exorciser nos noires pensées, nous ne cessons de parler de lui au travail et c’est ainsi qu’en évoquant son cas, de multiples autres cas, souvent moins graves, sont révélés. Ainsi un collègue me raconte comment un jour il s’est levé de son siège et titubait comme un alcoolique. Pris de panique il a consulté un médecin qui a diagnostiqué un épuisement grave ou « burn-out », lui indiquant qu’il devait « lever le pied » immédiatement. Son travail étant très prenant il s’est un peu reposé puis a repris son rythme. Que risque-t-il à l’ avenir ?

Une autre collègue me raconte qu’un samedi en faisant ses courses, elle s’est évanouie dans la rue. Symptôme d’épuisement également. Mais encore une fois cela ne lui a pas servi de leçon et elle a vite repris un rythme tendu.

Un responsable de l’entreprise en visite chez un client se met à critiquer vertement par email tous ses collaborateurs leur donnant ordres contradictoires et diffamatoires.

On m’a également évoqué l’histoire de ce collaborateur atteint d’une leucémie incurable qui avait décidé de travailler de son mieux sur un dossier délicat et qui est finalement mort juste après le succès de sa mission sans qu’aucun de ses supérieurs ne l’aie félicité ou remercié.

On me raconte l’histoire de ce collègue ayant travaillé durant 36 heures d’affilées sans dormir et avec un décalage horaire en plus…

Je me rappelle ce collègue d’un autre site qui quelques mois avant avait tenté de sauter par la fenêtre et avait été retenu par ses chaussures…

Le collègue proche de mon bureau m’inquiète, il mène parfois une guerre par email interposés avec d’autres collègues. Pendant la rédaction de ses missiles électroniques, il grimace si outrageusement que cela paraît caricatural.

D’une manière générale, plus les collègues sont fatigués plus leur agressivité augmente, rendant la vie d’entreprise encore plus dure pour ceux qui restent encore saints d’esprit. Les conflits explosent et rendent le travail improductif. Pas un jour ne passe sans une engueulade ni un conflit.

Pendant ce temps, commencent dans notre entreprise les négociations avec les partenaires sociaux sur le stress au travail. Mais le sujet est obsolète, actuellement nous parlons de « burn-out », d’épuisement au travail. Pourquoi une telle augmentation de ces affaires ? Simplement car la crise économique à engendré des plans sociaux et que le travail, lui, n’a pas été allégé pour autant. Ainsi, moins de personnes sont amenées à faire un travail identique. Dans ce cas il n’y a que deux solutions : le travail est moins bien fait ou les gens s’épuisent au travail. La peur de perdre son travail en période de crise économique peut faire basculer les individus vers cette deuxième solution, fortement destructrice. Personne n’est épargné : ouvriers, cadres, directeurs… Même si, force est de constater, que les cadres et parfois les cadres dirigeants sont majoritairement touchés. Ces situations dramatiques ne sont pourtant pas profitables aux entreprises car un collaborateur épuisé est moins efficace et accumule les erreurs parfois graves. La mise hors-circuit brutale de certaines personnes désorganise les entreprises déjà sous pression. Les initiatives sur le stress arrivent bien tard, hélas et dureront bien trop longtemps comme toutes les négociations sociales. Combien encore de collègues allons-nous risquer de perdre avant que le problème soit enfin traité ?

Si le problème de « burn-out » est présent dans tous les pays, la France semble plus durement touchée. On parle de 10% des salariés. Certains secteurs comme l’industrie et la santé payent un plus lourd tribut. Quoi que l’on puisse vivre ou craindre, est-il nécessaire de rappeler qu’il faut savoir dire « non » en entreprise lorsque la charge devient trop importante et qu’aucun travail ne vaut que l’on sacrifie sa santé ou sa famille. Je ne compte plus les collègues qui ont eu des problèmes de divorce. La santé et la famille même sont des biens inaliénables. Nous nous épuisons lentement et ce, sans félicitation, reconnaissance, gratification financière avec pour seule perspective une délocalisation. Pourquoi ? Il nous a été expliqué qu’il fallait travailler plus pour gagner plus. Maintenant on nous explique qu’il faudra travailler plus et plus longtemps, qu’il est normal que le PDG d’entreprise publique cumule plusieurs emplois (sans nécessité) et qu’il gagne des millions d’euros, mérités par son intelligence et parce qu’il travaille beaucoup (plus que nous)… Pourtant avons nous jamais vu un PDG de grande entreprise mourir de « burn-out » ? Le monde marche sur la tête avec notre consentement silencieux. Finalement n’avons-nous pas ce que nous méritons ?

Au fait, connaissez-vous les signes initiateurs d’un « burn-out » ? Résultat d’un stress prolongé et intense, il provoque un épuisement physique et psychologique. Les signes annonciateurs sont des palpitations, des mains moites, des suées, une digestion douloureuse et perturbée, des troubles du sommeil, une consommation accrue de tabac et/ou d'alcool, une émotivité exacerbée. Lorsque le « burn-out » est atteint, cela arrive brutalement, l’individu ressent une profonde fatigue permanente et irrécupérable (même par du repos ou des vacances), des courbatures et douleurs corporelles inexpliquées, des insomnies, un manque d’appétit, une perte d’émotion, une dévalorisation de soi, un sentiment d’inutilité, une dépersonnalisation forte (attitude du robot). Quelles sont les solutions ? Un long arrêt de travail permettant un traitement médicalisé et psychologique. Il arrive qu’après un « burn-out », la « victime » ne puisse plus travailler, tant la peur de reprendre le rythme d’avant l’accident est grand. Le « burn-out » peut tuer ou handicaper gravement.