A lire dans Le Figaro.fr:
Des petits opérateurs veulent importer à bas coût du clinker, un composant du ciment.
Le ciment n'est pas délocalisable car c'est un produit dont le transport coûte trop cher. Pendant longtemps, les grands fabricants de matériaux de construction ont martelé cette maxime. Or voilà qu'aujourd'hui, elle est battue en brèche. Et celui qui remet en cause ce principe s'appelle Jean-Marc Domange.
Ex-directeur général de ciments Calcia et ex-président du Sfic (Syndicat français de l'industrie cimentière), il a lancé Kercim avec un objectif clair: produire du ciment à prix bas. Quel est son secret pour y parvenir? En tentant d'échapper à la taxe qui s'appliquera en 2013 sur les émissions de carbone liées à la fabrication du ciment. Ce qui est possible à condition d'acheter hors de l'Union européenne le clinker, un composant du ciment qui à la particularité d'émettre beaucoup de CO2 pour sa fabrication. Kercim s'approvisionnera peut-être en Turquie ou en Égypte voire en Chine. Et il transformera son clinker en ciment dans un centre de broyage installé dans le port de Saint-Nazaire.
Cette distorsion de concurrence était dénoncée avec force mardi par Bruno Carré, l'actuel président du Sfic: «Le danger se matérialisera en 2013 au moment où chaque tonne de ciment comprenant 750 kg de carbone sera taxée 20 euros. Jusqu'à cette date, la menace est limitée car l'Union européenne ne taxera les industriels que s'ils produisent plus que les quotas définis. Or avec la crise économique, personne ne dépasse ces quotas.»
Kercim a les autorisations
Pour l'instant, le centre de broyage n'est pas construit. Mais le projet est solide. Kercim a obtenu toutes les autorisations pour s'installer à Saint-Nazaire. L'entreprise investira 45 millions d'euros dans le projet. Elle compte employer cinquante salariés et produire 100.000 tonnes de ciment. Les travaux de construction commenceraient dans les prochaines semaines. Et les lieux devraient être opérationnels au printemps 2012.
Un projet similaire a émergé à Fos-sur-Mer, à côté de Marseille. Caps Vracs envisageait d'installer un centre de broyage employant quarante personnes. Avec un investissement de quarante millions d'euros et une production attendue de 500 000 tonnes de ciment. Finalement, Caps Vracs a jeté l'éponge, car il n'a pas réuni le tour de table escompté. Dans d'autres cas, le centre de broyage était opérationnel. Mais il a été racheté in extremis par un major pour empêcher l'importation de clinker de pays exotiques. Ainsi, Lafarge a acquis auprès de Paul Albrecht, le dirigeant de Cap Vracs, un centre de broyage à Dunkerque.
De là à penser que l'industrie cimentière sera frappée demain par un mouvement massif de délocalisations, il y a un pas que ne franchit pas Bruno Carré: «Il n'y aura pas de délocalisation d'usine, explique-t-il. En revanche, quand de nouvelles cimenteries verront le jour, les groupes seront tentés de les mettre dans un pays non taxé.» À moins que tous les cimentiers se mettent d'accord sur une taxe concernant la tonne de CO2 qui serait uniforme dans le monde. Mais, aujourd'hui, cette démarche semble illusoire.
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