Un article à lire dans les archives du Parisien.fr.
Auteur d'un livre intitulé « les Nouvelles Géographies du capitalisme »*, l'économiste Olivier Bouba-Olga est spécialiste des choix de localisation des entreprises. Si, pour lui, les relocalisations ne sont pas « un phénomène massif », il s'agit tout de même d'une tendance « intéressante, qui n'a rien d'anecdotique ». Pour cet expert, quatre raisons principales expliquent les récents exemples de relocalisations. 1- Une faible productivité du travail dans certains pays Lorsqu'elles délocalisent, les entreprises espèrent réaliser de substantielles économies sur les salaires. Certes, des rémunérations cinq, dix ou même quarante fois moins élevées qu'en France, comme c'est le cas en Inde par exemple, peuvent faire rêver.
Mais si la productivité du travail n'est pas au rendez-vous la délocalisation devient alors une mauvaise affaire. Or il n'est pas facile d'évaluer à l'avance la productivité de la main-d'oeuvre en Europe de l'Est, au Maghreb ou en Asie… « Parfois, les entreprises se trompent dans leurs calculs », estime Olivier Bouba-Olga. 2- Des coûts et des délais de transport plus élevés De plus en plus, les entreprises doivent être réactives par rapport aux marchés. Or acheminer par bateau des marchandises produites en Asie nécessite au minimum cinq à six semaines, un délai trop long pour satisfaire immédiatement la demande des clients. Le coût de ces grandes traversées maritimes doit également être pris en compte. « Lorsque l'entreprise Samas, qui fabrique du mobilier de bureau, a décidé en 2000 de délocaliser sa production en Asie, le pétrole était à 30 $ le baril », explique Olivier Bouba-Olga. En 2006, Samas a rapatrié en France la fabrication des caissons métalliques de bureau. Si elle ne l'avait pas fait, elle aurait pris de plein fouet la flambée des tarifs pétroliers en 2008. 3- L'augmentation des salaires en Asie et ailleurs Même en Chine, les salaires ne restent pas indéfiniment bas… Plus les entreprises étrangères investissent dans un pays dit « émergent », plus la main-d'oeuvre qualifiée se raréfie et plus les salaires locaux sont tirés vers le haut.
Selon les calculs d'Olivier Bouba-Olga, en 1996, une heure de travail en République tchèque coûtait huit fois moins cher qu'en France. Six ans plus tard, cet avantage comparatif en faveur de la République tchèque n'était plus que de 1 à 5. 4- Un souci de qualité et de service pour les clients Schématiquement, les entreprises peuvent poursuivre deux stratégies différentes : soit elles recherchent en priorité une baisse des coûts, soit elles misent sur l'innovation et la différenciation de leurs produits. Dans ce cas, la relocalisation en France est souvent privilégiée afin de garantir la qualité et le suivi après-vente auprès des clients.
Olivier Bouba-Olga, « les Nouvelles Géographies du capitalisme », éditions du Seuil, 2006, 241 p., 21 €.
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