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Devenue tristement célèbre suite à la vague de suicides qui a eu lieu dans ses usines, la société Foxconn, qui emploie plus de 900.000 salariés en Chine, a fait l'objet d'un rapport universitaire indépendant qui dénonce « des camps de travail à la culture militarisée ». Une sorte d'esclavage moderne assumé par l'un des employeurs les plus puissants de Chine. Le tout subventionné par l'Occident-consommateur.
« Des camps de travail à la culture militarisée », c’est la conclusion d’une étude réalisée par des chercheurs d’une vingtaine d’universités de Chine, Hong-Kong, et Taïwan sur les conditions de travail à l’intérieur des usines du géant de l’électronique Foxconn. La charge est lourde, elle sonne comme un coup de massue en pays communiste où les stigmates du goulag (les « fameux » laogai chinois qui ont vu défiler des millions de travailleurs) sont toujours vivaces.
Si comparaison n’est pas raison, il n’empêche : chaque laogai chinois peut accueillir plusieurs dizaines de milliers de prisonniers quand les usines Foxconn alignent 400.000 personnes comme à Shenzhen, lieu de montage des iPhone, dans des conditions décrites, encore une fois, comme proches des « camps de travail». Une expression qui ne doit rien au hasard.
La compagnie taïwanaise qui est le plus grand producteur au monde de composants électroniques, est devenue l'une des entreprises les plus connues en Chine suite aux suicides, coup sur coup, de 13 de ses employés en 2010.
Le rapport recense 6 problèmes majeurs :
1. Bas salaires et durées de travail excessives ;
2. Management militaire : obéissance absolue, système de quotas de production, punitions et harcèlements inhumains ;
3. Manque de prévention et de traitement des maladies professionnelles et des accidents du travail ;
4. Exploitation des étudiants stagiaires ;
5. Sévérité dans la gestion des dortoirs des ouvriers ;
6. Inefficacité des syndicats et des systèmes de doléance.
D’après cette étude, 14,6 % des employés de Foxconn auraient également subi des violences physiques. Le rapport révèle également que les employés du sous-traitant d’Apple effectueraient en moyenne 83,2 heures supplémentaires par mois, soit plus de deux fois le quota autorisé. La société taïwanaise est également soupçonnée d'oublier le paiement d'heures supplémentaires, d'obliger des étudiants stagiaires à travailler au delà des huit heures quotidiennes autorisées par la loi et plus grave encore de falsifier des certificats médicaux pour contraindre les salariés à travailler au contact de substances dangereuses. Foxconn a rejeté «avec force et catégoriquement» ces accusations, assurant qu’il s’était engagé à offrir un «environnement de travail sûr et positif» à ses 920.000 employés en Chine.
Foxconn: le Roi mondial des sous-traitants
Rédacteur en chef du China Labour Bulletin, l’écrivain dissident Cai Chongguo, réfugié en France estime sur le blog de l’association que « la série de suicides chez Foxconn a révélé un fait choquant : l'univers de cette classe sociale ne peut être aisément appréhendé par les autres classes, qu'il s'agisse des fonctionnaires, des intellectuels ou des cols-blancs, sans parler des patrons. Les conditions de dialogue et de compréhension entre les différentes couches sociales sont de plus en plus difficiles. Et cette rupture sociale est terrifiante ».
Célèbre blogueur, Chang Ping estime pour sa part que le modèle de management de Foxconn n’est pas seul en cause et que quelques milliers de yuans (90 euros d’augmentation accordés ) ne suffiront pas à calmer les souffrances sociales des travailleurs pour la simple raison que Foxconn est devenue l’usine low cost modèle, qui fait tourner l’Empire du Milieu, ce qui lui confère un poids symbolique et politique sans équivalent :
« On dit en Chine que Foxconn est seul à pouvoir prétendre au titre de « Roi mondial des sous-traitants ». Ce titre ne fait pas référence au nombre de ses employés, mais plutôt à un environnement social et politique. Grâce aux impôts colossaux qu'il reverse à la collectivité, Foxconn a gagné un poids politique qui dépasse de loin son influence économique. Bien qu'il existe des lois régissant le travail en Chine, Foxconn a eu la liberté de mettre au point un système de management grâce auquel il tire une grosse partie de ses bénéfices en forçant ses employés à faire des heures supplémentaires. Même la police de Shenzen ne peut facilement faire respecter la loi au sein des installations de Foxconn, ce sont en effet des agents de sécurité privés qui y jouent le rôle de la police ».
Et la montée en puissance du géant de l’électro-magnétique n’en est qu’à ses balbutiements.
Le groupe, sous-traitant d’Apple, de Dell, Sony et Hewlett-Packard, continue un impressionnant développement sur le continent. Il a ainsi prévu d’y porter ses effectifs à 1,3 million d’ici à la fin 2011.
Foxconn, un état dans l’état chinois ?
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