A lire dans l’Expansion:
Selon le Financial Times, l'UE n'a dépensé que 10% des 347 milliards d'euros de fonds structurels alloués jusqu'en 2013 pour promouvoir le développement de régions pauvres d'Europe. Le quotidien britannique dénonce aussi des détournements.
A quoi servent les fonds structurels européens?
Les fonds structurels sont le premier outil de la politique de cohésion et de la solidarité budgétaire entre Etats membres. Ils visent à redistribuer la richesse européenne et à réduire les différences économiques et sociales dans l'Union. Deuxième poste de dépense après la PAC, ils s'élèvent en effet pour la période de 2007 à 2013 à 347 milliards d'euros, soit un tiers du budget européen. Dans le détail, l'UE investit cette somme par l'intermédiaire des trois fonds : le Fonds européen de développement régional (FEDER) pèse environ 200 milliards, le Fonds social européen (FSE) qui dispose de 75 milliards se concentre sur l'emploi et enfin le Fonds de cohésion, de 70 milliards, est destiné exclusivement aux Etats les plus pauvres. Ces fonds peuvent être alloués à la recherche-développement, l'éducation, la formation professionnelle, l'infrastructure, la protection environnementale, la modernisation de l'agriculture etc.... En somme, l'argent sert aussi bien à construire des autoroutes et des musées que des salles de gym dans les 27 Etats membres, sachant qu'au total, 646 000 projets doivent ainsi être financés. Chaque Etat contribuant proportionnellement à sa richesse, la France donne neuf fois plus qu'elle ne reçoit.
Pourquoi les fonds n'ont-ils pas été intégralement versés ?
Selon le Financial Times et le Bureau of Investigative Journalism, seulement 10% des fonds structurels ont été dépensés sur des projets parce que les Etats concernés ne peuvent fournir les fonds requis. En effet, la règle, élaborée avant la crise, veut que les Etats doivent contribuer de leur côté à hauteur de la moitié du financement des projets retenus. S'étant tous lancés dans des programmes d'austérité, les Etats ont plutôt tendance à renoncer à des projets qu'à en lancer des nouveaux.
De son côté, Bruxelles tente de minimiser le phénomène et assure que l'argent n'est pas perdu. "Le démarrage lent en début de cycle de financement n'est rien de nouveau, en fait c'est assez normal", a souligné la porte-parole de la Commission européenne Pia Ahrenkilde-Hansen. L'actuel cycle de financement des fonds européens est prévu pour la période 2007-2013. Mais jusqu'en 2009, les Etats européens dépensaient encore de l'argent du cycle précédent (2000-2006), a-t-elle précisé. "S'il n'y a pas d'argent pour les cofinancements, nous ne demandons pas de paiements aux Etats, donc cet argent reste sur leurs comptes" et "il n'existe pas de compte bancaire européen où de l'argent dormirait, inutilisé", a-t-elle insisté.
L'argent est-il détourné ?
Le problème c'est qu'une fois versé aux régions, l'argent disparaît dans des circuits "complexes" et "opaques", dénonce le quotidien économique. Résultat, des sommes importantes atterrissent dans les poches de la mafia, notamment la ndrangheta qui serait une "experte" en la matière. Ce qui expliquerait par exemple que, comme l'a déploré le député Alain Lamassoure, malgré les 10 milliards d'euros reçus par le Mezzogiorno italien, l'écart de niveaux de vie avec la moyenne européenne a continué à croître.
L'argent finit également dans les comptes de multinationales, comme Coca-Cola, IBM et Nokia Siemens, alors que les fonds sont destinés à aider les petites et moyennes entreprises. Le FT cite l'exemple de Britsih American Tobacco, qui a reçu 1,6 millions d'euros pour l'aider à construire une usine de cigarette, alors même que l'UE dépense des millions pour tenter de dissuader ses citoyens de fumer...
D'autres grands groupes se servent même des fonds européns pour délocaliser au sein de l'Union. Le cas de Dell est emblématique : le groupe américain d'informatique, qui avait bénéficié une première fois de subventions pour ouvrir une usine en Irlande, a recouru une deuxième fois aux fonds en septembre 2009 pour fermer l'usine irlandaise et soutenir les employés licenciés et une troisième fois pour ouvrir un autre site quelques jours plus tard en Pologne.
Le Bureau of Investigative Journalism pointe enfin d'autres usages illégaux des fonds, tels que la construction d'hôtels sur des sites naturels protégés en Espagne
"Des irrégularités et des fraudes existent, et c'est regrettable", concède pour sa part Mme Ahrenkilde-Hansen. Mais le taux d'erreur a été réduit de moitié en 2009, à environ 5%, et seuls 0,2% d'erreurs sont imputables à des fraudes, affirme la Commission européenne.
Comment réformer le système ?
La Commission européenne a déjà lancé une consultation publique afin de réformer le fonctionnement des fonds structurels. Cela pourrait passer par des objectifs de performance plus stricts et la concentration des fonds sur quelques domaines prioritaires plus facilement contrôlables.
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