Pour Charles Beigbeder, du MEDEF, le retour à l’équilibre budgétaire nécessite le sacrifice de notre modèle social, car taxer les riches est ridicule et inefficace. La mondialisation vous inquiète ? vous avez grand tord car c’est une formidable opportunité pour nous et notre modèle social ! Qu’on se le dise !
Ce mardi 11 octobre 2011, dans le grand journal de BFM radio, Charles Beigbeder, président de la « commission recherche et innovation » du MEDEF (et UMP convaincu) n’avait qu’un mot à la bouche : il est urgent de diminuer les dépenses sociales de 90 milliards d’euros, car il ne faut rien attendre de la nouvelle taxation sur les hauts revenus décidée par le gouvernement : elle est symbolique et dangereuse.
Analyse : Ce fut donc un festival de contrevérité et de mauvaise foi libérale pour justifier ce sacrifice. Ici, pas question d’augmenter les impôts qui ont pourtant fortement baissé pour les riches sous la présidence de Nicolas Sarkozy, mais uniquement de diminuer les dépenses sociales. En gros pas question que les riches, trivialement assimilés à des acteurs économiques dynamiques créant des « boites » et des emplois, mettent la main à la poche, c’est le social qui doit trinquer. La taxe sur les hauts revenus est symbolique (0,25 % de l’effort à faire) et ne sert à rien.
La taxe sur les hauts revenus est de 3 % pour les revenus de 250 000 à 500 000 euros et de 4 % au-delà. Pour Beigbeder, il faut trouver 90 milliards d’euros par an et que cette mesure rapportera 300 millions d’euros. D’après lui, même si l’on passait la taxe à 15 % cela ne ferait qu’un milliard soit 1 % du problème (pas tout à fait en fait, 1,11 %).
Analyse : Très bien, mais rien ne dit qu’il ne fallait pas fixer la limite à 100 000 euros de revenus annuels (déjà très confortable) et ne pas mettre une progressivité allant de 10 % à 30 %. Rien ne nous interdit de supprimer tous les cadeaux fiscaux mis en place par le président et qui nous ont mis dans cette situation.
Pour lui si cette taxe symbolique n’est pas accompagnée de mesures drastiques de réduction des dépenses cela peut être dangereux : il faut tailler dans la dépense. C’est donc un problème d’état providence « qu’il faut refonder, car on veut le sauver évidemment ». « Tout le monde doit faire un effort ».
Analyse : C’est assez fort, car si tout le monde doit faire un effort, il reconnait que les riches doivent faire un effort symbolique, mais que la presque totalité de l’effort doit être fait sur le social, c'est-à-dire : l’effort doit être porté presque exclusivement par les pauvres ! Il a même l’audace de dire qu’il faut « refonder » (donc détruire ou fortement raboter, de 90 milliards précisément) l’État-providence, et ce, « pour le sauver » « évidemment » ! l’État-providence : l’autre cheval de bataille des ultralibéraux…
D’après lui c’est par ce que nous sommes dans « un assistanat généralisé » et que « cela ne peut plus durer » que nous sommes dans cette situation, ce n’est en aucun cas à cause des banques. Cette taxe est « un message pas très positif pour les agents économiques les plus dynamiques qui créent des boites et des emplois ».
Analyse : La thèse qui veut que tous nos malheurs viennent des dépenses sociales qui ne sont que de « l’assistanat généralisé » est un grand classique de l’ultralibéralisme. Il est également très simpliste de considérer que les revenus supérieurs à 250 000 euros sont ceux des personnes qui créent « des boites et des emplois » ! Pour ma part, je dirais que c’est tout sauf cela. Mon pauvre plombier qui travaille 15 heures par jour, qui refuse des contrats et ne peut embaucher de nouveaux employés (il en a déjà quatre), car la banque ne lui prête plus et qui ne se verse que 2000 euros par mois est lui un vrai entrepreneur, un de ceux qui font l’emploi en France et il a des revenus à peine supérieurs aux SMIC ! N’oublions pas que les PME sont le premier employeur de France et que personne au gouvernement ne pense à lui. Les personnes qui gagnent plus de 250 000 euros sont des cadres de très haut vol d’entreprises du CAC40 ou pire, de purs investisseurs qui ne créent pas d’emploi, mais en détruisent régulièrement. Monsieur Beigbeder, il serait temps que vous regardiez autour de vous !
Montebourg en prend pour son grade : il s’oppose au retour des déficits sous la barre des 3 % alors, d’après Beigbeder, qu’il faudrait revenir à 0 % voir à +1 % ! Les Français ne comprennent pas la « science économique », car on ne l’apprend pas à l’école : 2/3 des importations chinoises sont réexportées, si l’on met des barrières douanières c’est toute l’économie qui s’effondre et « l’immense majorité de nos emplois qui disparaissent », un salarié sur quatre dépend de l’exportation, la mondialisation est une chance extraordinaire. Cela permet les grandes avancées technologiques de ces dernières années. Le monde est en croissance de 4 % par an certains sont à 8 % d’autres à +1 %. Il faut saisir cette chance : il y a des milliards d’êtres humains qui cherchent à améliorer leur niveau de vie, aidons-les, allons chercher ces nouveaux marchés fantastiques pour nos entreprises et on pourra financer notre modèle social.
Analyse : C’est tellement dense en contrevérité et en idéologie ultralibérale primaire que cela en devient amusant et facile à démonter :
- Si l’on retournait à 0 % (ou même +1 %), ce que personne ne propose ni ne demande d’ailleurs à part Beigbeder, cela voudrait dire que la France n’investirait plus qu’elle ne ferait qu’accumuler des richesses. C’est comme interdire tout crédit à un ménage, nous pouvons nous en passer, certes, mais un peu de crédit bien utilisé n’a jamais fait de mal a personne bien au contraire ! C’est bien méconnaitre l’économie que de viser 0% ou +1%…
- Dire que l’économie est une science comme il aime à le souligner est ridicule et bien évidemment faux, ceci, même pour des ignares, nous est rappelé par le nombre de crises économiques qui se succèdent et qu’on n’a pas su prévoir et empêcher. Manifestement monsieur Beigbeder n’est pas un scientifique sinon il saurait ce qu’est une science, c’est d’ailleurs bien regrettable car il est tout de même de formation ingénieur de l’école Centrale Paris !
- Le fait que l’on réexporte une partie de ce qui est importé ne justifie rien. Si l’on prend l’exemple d’Apple aux États-Unis, nous savons que si la recherche et développement est américain, la fabrication est purement chinoise. Si l’on suit le raisonnement de Beigbeder, Apple est une bonne affaire pour les Américains pourtant on peut lire qu’Apple avec sa fabrication 100 % chinoise serait responsable pour plus un milliard du déficit commercial américain ! Ceci signifie simplement que, le réexport de produit hautement technologique n’est pas rentable et générateur de déficits commerciaux !
- Dire que parce que l’on s’est mis dans une situation délicate qui est une impasse, il ne faut pas changer est absurde. Oui, mettre des barrières douanières n’est pas non plus une solution miracle, ce sera aussi difficile au départ, car cela bouleversera beaucoup d’équilibres, mais n’est-ce pas justement ce que nous devons faire ? Ne devons-nous pas remettre à plat le système, et ce, même si c’est difficile ?
- La mondialisation est une chance extraordinaire seulement pour les peuples pauvres qui n’ont rien à perdre et tout à gagner, pour les Français ce n’est en aucun cas une affaire. Un homme politique et représentant du MEDEF ne doit-il pas se préoccuper uniquement des intérêts français ? S’il désire travailler pour des intérêts chinois qu’il parte en chine ou en Inde… Nous sommes en grave déficit comme Beigbeder aime le répéter pendant que les Chinois croulent sous les excédants budgétaires et Beigbeder nous propose de les « aider », c’est tout simplement surréaliste !
- Faut-il rappeler à Beigbeder que les miettes de croissance que la mondialisation nous accorde ne sont pas de 1 %, mais très proche de 0 % comme le montre les derniers chiffres français…
- Financer notre modèle social avec les nouveaux marchés qui s’ouvrent est une illusion ridicule : si cela marchait, nous n’en saurions pas là. Pourquoi cela ne marche-t-il pas ? Parce que les pays pauvres sont plus protectionnistes que nous : une société occidentale ne peut entrer sur le marché chinois que si le gouvernement chinois est d’accord et en général ce n’est le cas que parce qu’il y a des transferts de technologie important sur des secteurs stratégiques pour les Chinois. Rien de tout cela en Europe et la chancelière Allemande a du se fâcher, car les Chinois venaient en Allemagne acheter des PME, pillait leur savoir-faire et repartaient en Chine !
- Vous remarquerez qu’il ne parle absolument pas des mesures nécessaires pour réindustrialiser la France, seule option pour recréer des emplois au lieu de ne vanter que les emplois d’import (et exports) qui ne sont souvent que le symbole de l’aggravation de notre déficit commercial. Ou sont ses propositions innovantes sur le sujet ? Il est vrai que Beigbeder est plus un financier qu’un industriel : Il a fondé le courtier en ligne Selftrade, le fournisseur d'électricité Poweo, le producteur agricole AgroGeneration, la société de réservation de loisirs Happytime et la société financière Audacia. Rien d’industriel dans tout cela, son seul vrai contact industrile n’a duré que peu de temps : juste après sa sortie d’école il a travaillé deux petites années chez Matra Marconi Space. Année industrielles vite oubliées.
Selon lui il faut faire « beaucoup, beaucoup de pédagogie » des réformes effectuées et de celles qui faut faire. Il ne faut pas attendre, car si l’on attend on peut doubler nos intérêts financiers. La journée d’action contre l’austérité est un échec total : 5000 personne à Marseille ce qui prouve que les Français ont compris qu’il fallait des sacrifices… D’ailleurs si nous ne faisons pas rapidement ces sacrifices, la dégradation de la note français va surement doubler les frais financiers de la dette.
Analyse : autre grande lubie des ultralibéraux : si l’on n’est pas d’accord avec eux c’est parce que nous n’y connaissons rien (nous n’avons pas été éduqués à la « science économique » à l’école) et parce que les bonnes idées ultralibérales n’ont pas été présentées avec suffisamment de pédagogie ! Vu le bilan désastreux du gouvernement, c’est pour cela qu’il faut faire « beaucoup, beaucoup de pédagogie » des réformes effectuées et, mais aussi de toutes celles qui faut que nous fassions pour satisfaire l’ogre libéral… En revanche Beigbeder a raison sur un point, un seul finalement, il faut traiter ce problème de la dette rapidement et avant l’élection présidentielle car la note de la France sera dégradée après et cela nous coutera plus cher… Mais l’élimination de la dette n’implique pas uniquement des rabotages sociaux.
Alors si, au MEDEF, c’est cela la « recherche et l’innovation », il est urgent de supprimer cette commission, car c’est de la foutaise pure et dure !
1 commentaire:
C'est typique de cette élite mondialisée totalement coupée des réalités vécues par les gens ordinaires. Je ne serais pas étonné d'apprendre que ce même personnage qui doit très bien gagner sa vie trouve le SMIC bien trop élevé.
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